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ROMAN D’ARLES
• "
TEXTE PROVENÇAL
Publié en entier pour la première fois, d'après le manuscrit
db M. Paul ARBAUD '
AVEC
INTRODUCTION , NOTES BT APPENDICE
PAR
Camille CHABANEAU
Correspondant de l'Institut
J. MAISONNEUVE, LIBRAIRE-ÉDITEUR
25, QUAI VOLTAIRE, 25
1889
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A
MONSIEUR PAUL ARBAUD
. TÉMOIGNAGE DE GRATITUDE
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INTRODUCTION
Le ms. de M. Paul Arbaud, d'où est tirée la singulière composition
qu'on va lire, et qui nous a déjà fourni la Vie de sainte Madeleine ,
publiée au t. XXV de la Revue des langues romanes , est un volume
en papier, relié en velours rouge, dont le format, à l’intérieur, est de
224 millim. de haut sur 148 de large. Il comprend dans son état ac-
tuel 70 feuillets, numérotés au crayon, d’une écriture récente, plus un,
à la fin, non numéroté, qui paraît détaché d’un autre ms.
Quinze à seize feuillets doivent manquer au commencement. En
tête sont trois feuillets blancs, ajoutés par le relieur; entre le pre-
mier et le second, une lettre de Raynouard, que je vais transcrire, col-
lée sur onglet. Un autre onglet, non utilise, précède immédiatement.
Vient ensuite, après le troisième feuillet blanc, un autre feuillet non
chiffré, existant avant la reliure actuelle, qui contient la table du ms.,
d’une écriture du XVII e siècle, et une note au bas, d’une main plus mo-
derne (fin du siècle dernier). Le verso de ce feuillet est en blanc.
LETTRE DE RAYNOUARD *
a Paris, le 20 janvier 1831 ,
» Le Secrétaire perpétuel hon r * de V Académie 2
» Monsieur,
»> J’ai l’honneur de vous renvoyer le petit ms. provençal que vous
» avez bien voulu me communiquer. Je vous en fais mes remercie-
» ments et je vous prie de vérifier si, en original ou en copie, vous
» avez encore quelque ms. en cet idiome.
» La première des pièces contenues dans le ms. est intitulée, dans
» la note qui le précède, le livre d 'Esdras; il faut corriger de Sydrac.
» On trouve au moins deux 3 mss. de cet ouvrage à la bibliothèque
• Elle est sur p ipier in-4°, avec les mots Institut de France , Académie
française, et la tête de Minerve, imprimés en tète.
* Ceci est imprimé, sauf le mot honoraire , ajouté à la main au-dessus, en
abrégé.
3 Je ne crois pas qu’il y en ait d’autre, en provençal, que le numéro actuel
1158.
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VIII INTRODUCTION
» cl a roi, de meme que de la seconde pièce % Réponses faites par un
» enfant , etc.
» Je ne connaissais ni le roman contenant Y Histoire de la ville
» d'Arles y lequel remonte à la création du monde, ni la Vie de la
» Marie Magdelaine . J’ai trouvé dans ces deux ouvrages à glaner
» quelques mots pour le Lexique roman ou Dictionnaire de la lan -
» gue des troubadours , que je me propose de mettre bientôt sous
» presse en trois volumes ' in-4°. J'indiquerai les mots comme tirés
» du ms. de votre cabinet 2 .
» Je dois vous dire que les copies faites par Bertrand Boisset con-
» tiennent des changements ou des omissions de lettres qui défigu-
» rent les mots aux yeux des personnes qui n'entendent pas très-bien
» la langue, et ces fautes proviennent de la prononciation de l’époque
» et du lieu où Boisset écrivait:
e pour a : avie pour avia, etc.,
s pour ts ou z : das , poirias , enfantares, estares f
plos pour plors ,
flos flors,
odos odors .
» Le petit feuillet détaché appartient à la vie d’un saint qui a vécu
» avant saint Trophime, évêque d’Arles 3 .
» Le style en est bon; il est à regretter qu’on n’ait pas le ms. en-
» tier.
» Je vous prie d’agréer l’expression de ma reconnaissance et l’as-
» surance de ma haute considération.
» Raynouard. »
Adresse (sur la lettre même, 4* page ; pas de timbre de la poste) :
A Monsieur
Monsieur de Monmerqué,
Conseiller a la cour royale,
Paris.
1 On en connaît trois. Voir Bulletin de la Société des anciens textes , I,
71.
* Ce qu’il a oublié de faire, bien qu’il cite assez souvent soit la Vie de sabite
Madeleine (voy. mon édition, p. 57), so t la « Chronique d’Arles », comme il
l’appelle. Pour les exemples tirés de ce dernier ouvrage, voir les mots agotar ,
amorsar, calenda, gasar, glan 1 merce, pezada, prodomia, refinar, refres -
camen, trabuc, vespa.
3 11 appartient à la Vie de saint Trophime lui-même.
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INTRODUCTION
IX
TABLE
« Roman contenant le livre d’Esdras écrit par le comandemant du
» roy Bocus et transcrit par Bertrand Boisset 1 , citoyen de la ville
» d’Arles, le 13 juin 1372.
>» Réponses faictes par un enfant aux diverses demandes a luy faic-
» tes par un seigneur dupais d’orient transcrites le 13 de mars 1373.
» Roman contenant l’histoire ancienne de la ville d’Arles.
» La vie de s 1 * Marie Madelaine et sa venue en Provence avec sa
» sœur Marthe et les disciples de Jésus Christ.
» Le tout écrit par ledit Bertrand Boisset le 3 d’aoust 1375. »
Les folios 1-23 sont à deux colonnes par page, les suivants à une
seule.
F° 1, en tête, d’une main moderne (XVII* siècle?) : « Commence-
ment du livre d’Esdras parle roy Bocus. » Incipit : « Aysi fenison los
capitols del libre de Sidrac losquals comandet lo rey Bocus. Aysi co-
mensa lo libre del rey Bocus loqual fes escrieure de la siensa de Si-
drac e mes li nom Libre de Sidrac de totas siensias et setera. » La
copie se termine (f 6 20 r° a), à la fin du chapitre XX^.VI, par les
mots: « et aquel que ben lo conoyson e son comandament non volon
fayre, aquels son duramens tormentatz, si avant lor mort non qucron
merce e perdon e li prometan que jamays peccat non fassan et aquella
promesion atendan 2 . »
1 « Voir ce qui est dit de ce Boisset dans la bibl. du P. le Long au numéro
15269 de l’anc. édition ; et au t. III, p. 519, n° 33063, où est citée une chro-
nique ou journal de Bertrand Boisset, depuis le 4 juin 1365 jusqu'en 1461,
écrite en provençal, ms. in-folio deM. Thoraassin de Mazaugues, aujourd’hui
à Carpe Diras, dont parle avec éloge Honoré Bouche aux pages 384, 430, 431,
432, 434 et 435 de son histoire de Provence. Il dit que Bertr. Boisset, citoyen
de la ville d'Arles, avoit accompagné le pape Urbain V depuis Avignon jusqu’à
Rome, lorsqu’il y alla en 1368. Mais il ne [swi7 une ligne , remplie aux trois
quarts seulement, que je n’ai pu lire.] »
* Otte version du Livre de Sidrac est différente de celle que renferme le
ms. 1158 du fonds fr. de la B. N. Au contraire, elle ressemble tellement à la
version française contenue dans le ms. n° 49 de l'Ecole de médecine de Mont-
pellier qu’elle paraît, et pourrait bien eu effet, n’en être qu’une traduction.
Dans ce dernier ras., le Livre de Sidrac occupe 168 folios, à deux colonnes
par page, et contient, outre l’introduction et la table, 6i3 chapitres. Le ms.
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X
INTRODUCTION
ston atendan commence une ligne. Vers la fin de cette même ligne,
après un blanc, suit immédiatement: u O (en rouge) Ayso (fin de la
ligne) son coblas de Bertran Carbonrl . » Ces coblas *, écrites comme
de la prose, et sans que ni point ni aucun autre signe sépare les vers
de chacune d’elles, sont au nombre de 33. Toutes sont déjà connues.
Voici les numéros sous lesquels elles ont été publiées dans les Denk-
maeler de M. Bartsch (pp. 5 et suiv.):
1, 2, 4.5. 9, 14, 10, 18, 24, 17, 3, 6, 8, 7, 13, 12, 15, 16, 19, 20,
21, 22, 23, 25, 26,27, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 36.
Après la dernière de ces coblas, dont le dernier vers commence la
seconde colonne du verso du folio 23, on lit:
<c Finito romancio sit laus et gloria Christo.
» Qui escripsit escribat semper cum domino vivat, A.
» Anno domini millessimo ccc.lxx. secundo, die xni. mensis junii
fuit fenitum istud romanciô ad honorera Dei es (sic) mat’ ejus // Qua
(sic) Bertrando .b. escripsit totum et&. »
Et plus bas, d’une encre plus pâle :
« Nasquet Jaumet, filh de Bertran Boysset, l’an de nostra senhor
c’om conta .m.ccc.lxxvii. el jorn .v. de desembre e fon son pairin
mOsen Honorât, capelan de Sant Trofeme e sa mairina madona Este-
vena Alba, e fon bategat lo jorn mezeme, que fon disapte *. »
Ici finit le folio 23. C’est le dernier qui soit écrit sur deux colon-
nes.
F 0 * 24 r°-£j) v°. Réponses faites par un enfant , etc., ouvrage plus
connu sous le titre de Les dits de Venfant sage 3 . Incipit (sans aucun
titre): « Un enfant fon apellat apitus fon comandat a .i. archivesque.
Et aquel archivesque~coraandet lo al patriarcha de Jherusalem. . . . »
Fin : « Ar preguem dieu nostre senhor dieu Jesu Crist e la verges
santa Maria que nos meta el gaug de paradis, lay on tug li angel son.
A dieu plassa. A— m— e— n. >»
de M. Arbaud a perdu l'introduction et la lahle, correspondant aux folios 1-
12, plus une colonne, du ms. 149 de Montpellier.ee qui représente environ
15 feuillets, et le copiste, comme on l’a vu, n’a transcrit que les 36 premiers
chapitres. Dans le ms. de Montpellier, le 36« chapitre se termine à la fin du
foî. 27 r° ; celui de M. Arbaud ne contient donc qu’un dixième environ de
l’œuvre totale.
1 Raynouard sans doute ne les avait pas remarquées, non plus que le ré-
dacteur de la table, car ni l’un ni l’autre ne les mentionne.
* Cf. les mémoires de Boysset, dans le Musée d’Arles, 1876-7, p. 13. Tout
concorde, sauf la date, qui là est le 10 mars 1377.
3 Sur les autres rédactions et mss. provençaux de cet ouvrage, voy. une notice
de M. Paul Mever, dans !e Bulletin de la Société des anciens textes, I, 71.
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INTRODUCTION
XI
Ensuite on lit:
« Anno domini millesimo .ccc.lxx. tercio, die .xm. mensi marcii
fuit fenitum istud romancium ad honorem dei es (sic) mat’ ejus // qua
(sic) Bertrando boysseti escripsit totum et&. »
F°» 30 r°-50 v°. Le roman que je publie aujourd’hui et sur lequel je
vais revenir.
F°* 50 v°-69 r°. Vita beate Marie Magdalene . Voy. Reçue des lan-
gues romanes , XXVI, 106. La seconde moitié de la dernière page
est remplie par une miniature grossière : Deux femmes à tête nim-
bée ; l'une, à gauche, à genoux, tient des deux mains une petite boîte
surmontée d’une croix, qu’elle présente à l’autre ; celle-ci, debout, lui
tend la main droite, et de la gauche tient une croix.
F° 69 v°. Dessin à la plume et à l’encre noire, occupant toute la
page et représentant une tour environnée de remparts avec force au-
tres tours. En tête, on lit : Arles lo Blanc ; un peu plus bas, dans les
blancs laissés par le dessin: « Guibaudus (pour Tibaudust) est infra
sivitas ista. » Au fond, grossière représentation d’un fleuve, entre les
lignes ondulées de laquelle on lit deux fois : « Rodanus. » Ce dessin,
comme le suivant, se rapporte évidemment au Roman d'Arles .
F° 70 r°. Autre dessin : Cavaliers en marche, lances levées. Deux
seulement sont entièrement distincts. On lit sur la cuirasse du premier,
qui est tout à fait en tête: « Rolandus », sur celle du second (vers le
milieu): « Carolus rex est iste. »
Même folio, verso. Dernier dessin : au-dessous d’un cercle dans le-
quel sont quelques lettres majuscules, un pape agenouillé, au-dessus
duquel volent deux anges, l’un à droite, l’autre à gauche. De chaque
côté de la figure on remarque une inscription, et au-dessous un écu :
à gauche (de la page), Urbanus ; à droite, papa ,v. I/écu de droite
porte les initiales B B, qui sont sans doute celles de Bertran Boisset*
F° 71 (non numéroté). Ce dernier feuillet a été probablement dé-
taché d’un autre ms.; mais il paraît être, comme le reste, de l’écri-
ture de Bertran Boisset 1 . Il renferme les vers 400-457 du poëme sur
saint Trophime, dont une copie avait été faite par Bertran Boisset
en 1379, copie dont il est très-vraisemblable que le feuillet en ques-
tion faisait partie. La marge extérieure en a été rognée trop avant,
en sorte que le commencement des vers, au verso, manque partout.
Mais le recto est à peu près sans lacunes.
1 Chaque vers n’y occupe qu’une ligne, et la lettre initiale de chacun d’eux
est séparée de la suivante par un petit blanc, disposition assez fréquente dans
les mes. de nos anciens poèmes, mais qui ne se remarque dans aucune autre
partie du ms. de M. Arbaud.
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XII
INTRODUCTION
Le poëme qui occupe les folios 30 à 50 du ms. de M. Paul Arbaud,
et qui fait l’objet de la présente publication, ne porte aucun titre. Je
lui laisse celui d e Roman d'Arles, sous lequel M. Victor Lieutaud
en a publié en 1873 un long fragment, d'après une copie partielle du
siècle dernier, qui le lui donne. Ce n’est, d'ailleurs, comme le lecteur
s’en apercevra bien vite, qu’un grossier assemblage de pièces d’origine
différente et dont les deux premières n’avaient avec la ville d’Arles
aucun rapport. Bien que le ms. n’indique aucune division, on y recon-
naît sans peine trois parties bien distinctes, qui ont respectivement
pour sujet : la première, la légende du bois de la croix ; la seconde, la
vengeance du Sauveur ; la troisième, la prise d’Arles *.
Les originaux étaient en vers; mais un copiste (je ne sais si c’est
le dernier ou un autre) a singulièrement maltraité ces pauvres vers.
Au début, il transcrit à peu près exactement, ou du moins il semble
s’être proposé de le faire ; mais bientôt, tout en conservant à sa copie
sa première apparence, il allonge ou réduit les vers de la façon la
plus arbitraire, et les prive souvent de leur rime. Plus loin enfin, à
partir de la ligne 374, il cesse de les transcrire comme des vers, je
veux dire avec une majuscule en tête, et en consacrant à chacun d’eux
une ligne entière. Mais il introduit de place en place une séparation
formée de deux traits obliques (//), dans l’intention probable de dis-
tinguer chaque vers de ses voisins. Malheureusement, ce signe, si
telle a bien été, en effet, l’intention du copiste, a été souvent omis,
souvent aussi placé fort mal à propos.
L’ouvrage, si intéressant qu’il soit pour l’histoire littéraire, en rai-
son des renseignements qu’il fournit et des inductions qu’il autorise,
a, par lui-même, une valeur trop médiocre pour qu’on se donne la
peine d’essayer d’en remettre les vers sur leurs pieds. Aussi me suis-
je borné à reproduire tel quel le ms., imprimant comme des vers ce
qui y figure ainsi, à longues lignes ce qui y est à longues lignes. Les
séparations dont j’ai parlé, et qui sont marquées dans le ms. par un
double trait oblique, le seront ici seulement par un blanc.
La Légende du bois de la Croix paraît provenir d’emprunts faits
à deux poèmes, l’un en vers octosyllabiques, l’autre en alexandrins.
Dans la première partie, on ne remarque rien, au moins rien d’essen-
tiel, sauf le début, emprunté à la Genèse , qui ne soit déjà dans les
rédactions connues de cette belle légende ; mais la seconde offre des
particularités qui, à ma connaissance, ne se trouvent pas ailleurs et
qui seront signalées dans les notes.
La y engeance du Christ présente aussi, dans cette rédaction, des
* Cf. Gaston Paris, Histoire poétique de Charlemagne, p. 258.
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INTRODUCTION
XIII
traits qu ne sont pas dans les autres. Il est manifeste, en outre,
que la légende de Tibère s’y confond avec celle de Constantin. On y
a aussi mêlé en partie celle de saint Trophime.
Cette partie de notre compilation doit provenir d’un poëme, plutôt
peut-être de deux poëmes, en alexandrins, l’un traitant exclusivement
de la Vengeance du Christ , l’autre de l’origine d’Arles et de l’établis-
sement du christianisme dans cette ville.
Suit un récit qui paraît, en partie du moins, l’extrait, confus et fort
abrégé, d’un ou de plusieurs poëmes français 1 de la geste de Guillaume
d’Orange, et dans lequel, au milieu d’événements qui ne sont pas ra-
contés ailleurs, tels que la prise et la reprise d’Arles, mais auxquels
d’autres ouvrages font çà et là quelques allusions, on reconnaît nombre
de traits qu’on peut croire avoir été empruntés, non toutefois sans mo-
difications profondes, à des poëmes connus, tels qu’A liscans, Foulque
de Candie , Galien , Fierabras. Je renvoie pour les détails aux notes
qui suivent le texte.
On a vu ci-dessus qu’il existe une copie partielle de notre poëme 2 ,
laquelle a été publiée, en 1873, par M. Victor Lieutaud. Cette copie,
qui est d’une grande exactitude, sauf quelques erreurs de lecture, com-
mence à Quant Vespasien et Titus ac conquistat la terra (ligne 503
de notre édition) et finit à Ar fon Tibaut ar Arle tornatz (ligne 635),
au milieu d’une phrase interrompue.
De plus, la partie comprise entre les lignes 598 et 864 a été mise
en prose provençale, vers 1560, par Jean de Nostredame, qui, jaloux,
comme toujours, d'ajouter quelque fausseté au texte qu’il prétend re-
produire, fait figurer au ''commencement et à la fin de son récit un
personnage, celui de Tersin, sur lequel notre poëme est absolument
muet. Voyez là-dessus mes Notes sur quelques manuscrits proven-
çaux perdus ou égarés , p. 85. ( Revue des l . rom., XXVIII, 88.)
Au point de vue de la langue, le Roman d'Arles donnerait lieu en
général aux mêmes observations que la Vie de sainte Madeleine. Je
1 Que ces poëmes fussent français, c’est ce que paraissent prouver des
formes telles que quorosier , bategier, bies et pies (= pei's), conjet, Guilhen -
mes al cornier, mesci'eant , valants , poure (povre), pesa a { = pieça), etc.,
que le lecteur ne manquera pas de remarquer dans cette dernière partie de no-
tre compilation. Mais il est vraisemblable que notre texte n’en dérive pas direc-
tement. 11 doit avoir pour source immédiate un poëme provençal, déjà traduit
ou imité du français, que Boisset ou un copiste antérieur aura mutilé en le trans-
crivant.
1 A'x, bibl. Méjaoes, dans le ms. connu sous le nom de Chaos Arles,
pp. 153-155. De cet extrait on possède encore deux autres copies qui sont à
Arles. Voy. Lieutaud, lou Rouman d'Arles , p. 7, n. 2,
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XIV
INTRODUCTION
me borne en conséquence à renvoyer à celles que j'ai présentées sur
le texte de ce dernier poëme, pp. 61-67 de mon édition (Revue, XXVI,
109-116.) Quelques remarques particulières trouveront place dans les
notes de la présente publication.
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LE ROMAN D’ARLES
i
[F° 30 r°] Nostre senhor a sa semblansa
Fes Adam e[l] det benanansa.
Sapias tôt paradis li det,
Foras de .j. albre que li vedet.
5 Tostems am gran delieg visquera,
Ja non morira ni non mudera,
S’il non pasesa lo manda(men)t
Que Dôme Dieu lLavie'dat.
Mas nostra mortal enemig,
10 Lo diabol, que es mal e trist,
Penset con lo poges tentar
E d’aquel luoc foras gitar.
Amb Azeva premieramens
Sapias parlet musardamens,
15 E dis li, si creyre lo volie(s),
Tôt cant era saber poyria(s).
Tôt cant feron Dieus sap ben,
A qui non pot om selar ren.
Car non foron obediens,
20 Gitet lofs] foras mantenent.
Adam ni Azeva solamens
Non sofriran ges lofs] turments,
Que abans nos tug, quez en lus dis,
Anavan per els a perill,
25 Quant Jesu Crist nostre salvayre
Per so nasquet de verges mayre
Quez el nos tornes ambe se,
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16
[F 0 30 v°]
30
35
40
45
50
55
[F 0 31 po]
60
65
LE ROMAN D* ARLES
Don Adam vergonhos eysi.
Mas si solamens el nasques,
Non cre aras non profiches,
Que non sofrisa pacion.
En la cros justa los layrons
Mori e nos perdonet
E d’infern trastotz nos gitet.
Per que non cre jes que perdon,
Car nos em trastotz malz e félons,
Quar om de mal s’esfosa a far
En veser, en dir et en pensar,
E non pensa con li estara,
D’aquest segle cant n’eysira.
Qujas que tostems estiam
En aquest segle ni vivam?
Non farem veramens, barons,
Qu’enans morem tug, mal e bons.
La fenna fon mot de breu sens
E fes o tôt an son talent.
Tant preget Adam qu’el manget
Del pom que Dieus li vedet ;
Et cant agron del pom manjat,
Lur cor lur fon tôt cambiat.
Azeva si près az esgardar
Et comenset fort a sospirar,
Car vi lo senhal sobre si
Que femena fon ; non poc mentir ni esdir
Si non âges fag failhizon,
Car Adam fes manjar del pom.
Es Adam pueys si regardet,
Quar vi que Azeva si ploret.
« Fenna, que as ni que farem?
Sapias que nos o comprarem,
Quar avem pasat lo manda(rnen)t
Que dieus nos avie vedat. »
Adam d’aqui si va partir,
Yes .j. boyson s'en va fugir,
Ez el boyson si rescondet,
De dol qu’el ac cant si penset
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17
Le roman d'arles
Qu'el ac fag tant gran faliment
Ves Dieus, lo payre onnipotent.
« O y Dieus, payre plen de gran bontat,
70 Senher, aias mi pietat,
Quar ves vos ay falhit tant fort
Que non puesc far nengun conort. »
Sapias mot fort s’esgaymentet,
Tro que Dieus venc que lo sonet.
75 Eva trobet mot fort plorant.
« Digas, fenna, on es Adam ? a
— « Senher, lay es en sel boyson
On a consirat uey tôt jorn. »
— » Adam, Adam ! » — « Senher, vet m’aysi.»
80 — « A parti[r] ti coven de mi ;
Tôt paradis t’avia donat,
Que fezeses ta voluntat,
Foras d'est albre c’aysi es,
Nol toquesas per nulha res ;
85 Tu as crezut Eva el Satanas,
[F° 31 v°] El mieu as tengut en van ;
Non ti vuel damnar en peccat,
Ans vuel que ti sie perdonat,
Quar tu en mangiest e duptiest,
90 E fes o far Eva el Satanas,
Car dis que, si creyre lo volies.
Tôt quant era saber poyrias.
Eva, quar mon amie Adam
As fag far defalhir de tant,
95 Quar li fesist manjar del frug
Del albre que ieu avie retengut,
Die te sosmesa estaras
Ad Adam tant cant ja tu vieuras,
Ny totas sellas qu’apres venran
100 As ornes sosmesas seran.
An gran dolor enfantares
Et en greu pena estares.
Piatat vos ay e merse,
Per la pena que sufreres.
105 Tu, Adam, vieuras amb afan,
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[P° 32 r°]
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LE ROMAN D*ARLËS
Am suzor et an trebal gran.
De paradis te azir,
Quar non m’as volgut obezir.
Quar ieu t’ay fag al mieu semblant,
Donaray ti aquest dom mot gran.
Tôt quant es sot lo sel ti don,
Que sias senhor e don(nor).
De tôt quant tu mi pregaras
Sapias per sert auzit seras. »
— « Senher, post vostre plazer es
Que da sains vos mi gites,
Das mi que mi dega menar,
Senher, ayla von deg anar. a
Dieus li baylet .j. companhon,
Un angel que li fon guiron.
Dieus de paradis Io gitet;
Quant fon foras, tant si ploret
A Dieus en près piatat grant,
Cant vi qu’el s’en isi plorant.
« Adam, non plos ni ti maris,
Que enquaras auras paradis. »
En la val de Bergon s’en anet;
Sapias (aqui) lonc temps aqui estet,
Et anc l’angel non lo layset ;
Totas sarons l’acompanhet,
Et cant Adam volia ren,
L'angel venie de mantenent,
Demanda li tantost que quer
Ni de aquo que avie plazer.
Ganren agron d’enfans motz bels
E de mascles e de femels.
Quant l’angel los ac ajuzatz:
« Vauc m’en ueymays, pron s’ay estât. »
Cant Adam fon viels, qu’el dec morir,
Va sonar son fil Set e va li dir :
« Fils Set, en paradis vos n’ires,
Et mas pezadas vos sigres,
Que entro paradis van estar,
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Le ROMAN D*àRLËS 19
E plus non lay poyras pasar,
145 Et aqui t’ajunelharas,
[F° 32 v°] Dieus lo mieu payre pregaras
Qu’el mi trameta per sa bontat
De son oli d’umilitat.
E cant iras per lo camin,
150 Sovenga ti e renembre ti de mi.
Tant Ta de flosben odorantz,
Que non t'adonnas, de so ay paor gran. »
— « Payre, decha mi von es lo camin
Que puesca drechamens anar a paradis, a
155 — « Fil, vezes tu aysela peyra gran
Que desclina tant fort ves lo solel colgan ?
Ayla t’en vay et aqui es lo camin ;
Seges mas pesadas que trobaras aqui. »
Set s’en anet lay von son payre Adam li dis,
160 Et trobet lo camin d’anar a paradis.
Set s’en anet per .j a . montanha gran
E segui las pezadas de son payre Adam.
Cant fon sus la montada, et esgarda aval e vi .j. gran plan
Qu’en fon meravilhos, tant fon bels e grans.
165 Ez aval s'en deysendet,
E segui las pesadas de son payre,
E cant el fon aval el esgardet.
Mot i près gran plazer e sol non si restanquet ,
Ben fes son camin lay on anar dévia.
170 Quant aval ves lo rieu venc en la pradaria,
E las erbas del prat tant gran odor rendian
Que las fon(s) de pasar e de tener sa via.
A paradis s’en anet amb esfos,
Mot gran trebal, et el paset.
175 Tant eron grans las hodos de las herbas
[F 0 33 r°] E de las flos dels cams
Que tan gran son li vinia qu’el non podie anar avant,
S’il non si poyses amb espinas,
Per so qu’el s’en ânes révélant.
180 Quant el venc a paradis,
Trobet meravilhas que son mot grans,
Qu’el fon claus de flama de fuoc;
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20
LE ROMAN d’àRLRS
Et anet reduptant
Que non fos paradis ez ac dolor mot grant,
185 Entro que si penset aquo que li dis son payre Adam,
Que seguis sas pezadas,
Et aqui era paradis que plus non pasava avant.
Set estet for davant paradis apensat
Qu’el non sap von ânes areyre o avant,
190 Mas sovenc li de so que son payre li dis.
Quant fon al cap de sas pezadas, e el
Sonet fort per .ij. ves Chérubin,
Et, cant venc a la tersa ves, ez el li va venir e demandet li :
« Set, que demandas? que voles ni que queres?»
195 — «Mon payre Adam manda a Dieu que li trameta
D’oli de mizericordia
Per la sieua bontat. » E l’angil si parti de Set
Et a Dieus s’en va venir.
A Set va aportar .iij. grans del fru de paradis
200 E quel[s] mezes en la boca de son payre et tantos el morira.
E cant Set ac los .iij. grans que li baylet l’angel que li trames
Nostre*Senhor,
D’aqui si va partir leu e tost,
E retornet s’en a son payre, si con l’angel li dis.
[P° 33 v°] Quant Adam lo vi, comenset li a dir :
« Set, aportas tu ren de so que ieu t’avie dig ? »
— a Payre, vetci que m’a dat Chérubin. »
Adam près los .iij. grans que Set li aportet ;
Adam conoc los grans que foron del fruc
210 De l’albre que Dieus li avie devedat.
Set près los grans, en la boca los mes a son payre Adam,
E tantost can el los ac en la boca, et el mori per mandament
[de Dieu.
Set sonet sos frayres e aneron lo sebelir, los .iij. grans
En la boca. E cant venc al cap d'un temp,
215 De la boca d’Adam .iij. albres van isir,
E l’un si fes mot gran e los .ij. foron mot petits.
Qran tems visqueron, anc nengun non mori dels .iij. albres,
Tro que l’esdelubre de Noe fon pasat el segle fon avengut.
Sieutatz e vilas si bastiron per lo mar
220 An sauput en lo luoc von j aria Adam
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LE ROMAN D’ ARLES il
Feron la gent .j\ sieutat mot grant
Quez ac non Jozia, non que nengun saupes que ja aqui jaques
Adam, tro que venc a cap d'un gran tems,
Que .j. reys ac en la sieutat que avie nom Escorie,
2 % Ez avie .j. cavalier que fort crezie en Dieu Jesu Crist.
Una nueg en son sopni Dieus li va demostrar
Aqui on eran aquels .iij. albres, aqui jazia Adam.
Et era prop d'aqui lur escola, on anavon Dieus azorar.
.1. jorn lo rey los .ij. albres me[n]res el fes talhar.
230 Le cavalier, cant anavaa l’escola,
Al pe de l'aubre el venie Dieus orar,
Quant ac agut vezion que en aquel albre sérié Dieus
Crucificat. Ya o tener lonc temps, tro que .j. cavalier
Lo va al rey acusar. Lo reys fon fort irat
235 E vole vezer si era veritat.
[F° 34 r°] Un jorn, cant anava a l’escola,
Et el lo va sonar : « Anem nosz en a l’escola,
Per Dieus lausar. » Aquel que l'avie aeuzat
Vay dire al rey : « Régiras vos,
240 Senher, cant vos en seres pasat,
E veyres si es ver so que ieu vos ay contât. »
Lo rey s'en anet a l’escola am totz los cavalies ;
Quant foron prop de l' albre, aquest remas deries :
Aqui va remaner, davant l'albre s'ajunelet,
245 Et, cant s'en foron tug pasatz, lo rey se regeret
E vi lo denant l'aubre qu'estet ajunelat.
Lo rey sonet sas gens e va lur comandar :
u Barons, prenes aquest e anas l'en menar,
E metes lo en luoc que non s'en puesca anar,
250 Entro que sian vengut de l’escola Dieus pregar e orar.
E cant serem vengut et dinatz, nos farem
Venir aquels d'esta sieutat, e farem lu** saber
Si ayso que aquest fa ves Dieus si li ver* per plazer. »
Quant lo rey fon vengut e fon dinatz,
255 Mandet quere los melhos .iiij. homes de la sieutat,
E va lur aqui dire : « Aquest mieu cavalier ay ieu uey vist
Ajunelat al pe d'un [aubre] que om me a mostrat.
Vejas si es contra Dieu ni que a garanhat. »
Feron venir aquel ez an li demandât :
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52 LE ROMAN d’àRLËS
260 « Con azoras tu l’aubre ni con ti iest ajunelat? »
— « Dizea per que mi soy a l’aubre ajunelat?» — «Hoc.»
— « Quar aqui deu morir lo fil de la deietat per cert,
Per la falha que fes Adam quant manjet
265 Del pom de l’aubre que Dieus li avie vedat. »
E van sonar lo re y ez an li o contât
So que a dig aquel ; el r ey es fort irat.
Ya sonar de sos ornes, l’aubre va far talhar,
[F 0 34 y°] Fes lo gitar en .j\ ayga, l’ayga va l’en portar
Prop de Jheruzalem, aqui si va estanquar.
270 Per sus l’aubre pasavon las gens que otra l’ayga volian pasar.
Mot lonc temp estet aqui,
Tro que uns homs de Jheruzalem venc an sa filha,
E vole otra l’ayga pasar ; cujet si que sa filha
Lo segis per sus l’aubre, c’anc non o fes, que mays
275 Amet anar per l’ayga que sol l’aubre tocar.
Un jorn lo payre se près garda e va li demandar: [anar? »
« Per que non pasas tu per aqui von tu] me vezes pasar et
— « Non o vuelha Dieus, senher, que non o deg far. »
— « Per que?» — « Quar en aquel fust sera lo fil de Dieu cru-
280 Quant o auzi lo payre, e el fon fort iratz, [cificat. »
Ya penre aquel fust, en .j. cros lo va gitar,
On s’agotavan totas las aygas de Jherusalem la sieutat.
E estet aquel fust el cros, que anc non sorgi,
Entro que Dieus fon près per juzieus e jujat a mort.
285 Quant los juzieus anavon queren en que lo crusifiqueson,
Paseron sus aqui sus l’ayga, lo fust viron estar,
Aneron lo penre e van l’en portar, per Jesu Crist crucificar ;
E sus en aquel fust lo (va) van crusificar
Et a mort lieurar. E cant fon mort, en enfer
290 c’en anet per espoliar ; Adam ez Eva près
Per las mans, deforas los a gitat d'enfern e totz los autres.
Anc .j. non la remas, trastotz am si en paradis los menet.
Pueys al tes jorn ez el resucitet et apazec
Als apostols et als desipols, e pueis el sel s’en pujet.
295 Ar foron li jurieus trastotz desconsolatz,
Car viron que Dieus fon de mort resusitat,
[F 0 35 r°] Que mal non lur en pre(e)nga; ben o an gazanhat,
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LE ROMAN D*ARLEà 23
Car an lur senhor mort li trachos renegatz.
Adonc estet Pilât am gran conselhament,
300 Am los malvais juzieus, car tan gran falhiment
An fag ves Dieus li trachos mescreens.
a Pilât, car vos a dat consel. . , .
II
Adonc era Serar en Roma la sieutat ;
En son palais estet tôt sols fort apensat.
305 Venc li .j. cavalier gentil ez a li demandât:
« Senher, que aves ni de que es tant irat ? »
— a Quavalier, non ti meravilhes
S'eu sospire ni planhe ni estauc apensat ;
Ben son pasatz .vij. ans que non vi mon fllh Articlam,
310 Pueis que ieu lo tramis a Fréjus en la tore,
Que fis far sus en .j*. montanha,
A riba de mar, per so que l'ayre del sel e la fregor del mar
Ausireson las vespas o las en feres anar. »
— a Senher, dis lo cavalier, non vos des pensament.
315 Si vos voles, non tardara gayre que el n'aura d'aquel mal ga-
— a Digas m’o, cavalier, e non sie selat ; [riment. »
Si mon fil pot garir, tôt cant a y vos sie abandonat. »
— e Senher, non vuell aur ni argent, [près
Mais en Jherusalem mandas vostre prebost a Pilât, que ten
320 Un sans profeta, que Jésus e3 apelat, que aquel sans home vos
Que aquel lo vos gara de tôt mal. » [mene,
Sezar sonet sos escudies e va lur comandar:
u En Jherusalem vos n'ires a Pilât recou tar quel profeta
Qu'el près me dega el menar, non remanga per ren
325 Qu'el non o dega far. » Aras movon e s'en van li escudies [rar.
En Jherusalem recontar a Pilât las novelas que li manda Se-
[F® 35 v°] Quant foron en Jherusalem, (et) ez els van demandar
A las gens de la villa on estava Pons Pilât.
Al'ostal s'en vengron, Pilât an atrobat,
330 Gentilmens lo saludon ; et el lur a demandât :
« Barons, don es vos autres ni de quai reginat?
Digas m'o tantost, ren nom sie selat. s
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24 LE ROMAN d’aRLES
Ac pavor que non fosan de la part de Dieu quez an cruzificat
« Senher, nos em de Roma, de la nobla sieutat. [ juzieus.
335 Lo noble emperador Sezar a vos per nos vos manda,
Per l’amor que vos li tenes, aquel sant profeta que tenes près lo
— «Sapias, senhos, que trop vos es trigat, [li degas menar.»
O nos nos em trop chochatz, que si foses vengut
.Iij. jorns avans, ieu lo vos agra lieurat.
340 Mas li juzieus Tan mort e Tan crusificat.
Non lo li puesc menar, don en soy fort irat.
Iray m’en an vos autres en Roma, p(l)us que m’o a mandat. »
Aras si penset Pilât que si fezes selar,
E los donzels de Roma lo van mot esperar,
345 e cant l’agron trobat, si cujet escusar,
De l'anada de Roma el si cujet gardar;
Mas el tant non sap far qu’els non l’en aion menât ez enferat.
A la sota d’una galeia fortmens l’an liât
Et en Roma menât.
350 Aras fon Pilât en Rpma denant l’enperador.
L’enperador l’aculli e fes li gran honor.
« Pons Pilât, ben sias vengut, lo mieu amie coral,
Ez an joy reseuput. »
Dis Pilât : « Senher, Dieus vos mantenga per la sieua vertut. »
[P° 30 r°] — « Ar digas nos, amixs, aves mi vos adug
Aquel profeta que ieu vos ay mandat ? »
— «Non, senher, que los juzieus l’avien aeuzat e encolp(l)at
Que el obrava a lur festas, ez ayso ez els an proat.
Ieu lo lur ay baylat ez els l’an crusificat. »
360 Quant o auri l’enperador Sezar, el en fon fort irat,
Sonet lo cavalier gentil ez a li demandât :
« Digas, con o farem ? Aquel profeta es mort, so m’a contât
— « Senher, dis lo cavalier, ez ieu vos o diray : [Pilât. »
Pons Pilât porta la sieua vestimenta, que ieu mot ben o say,
365 E si vos, senher, aver la podes ni sus vostra fil la metes,
Sapias per sert garitz sera tantost cant el vestida l’aura. »
— « Digas, e con o poyrem far quez el la vuelha despuihar? »
— « Senher, sabes con vos o fares, e per aytal e vos Taures?
Per la sieutat fazes sercar lo plus bel drap que om poyra tro-
370 Fas Ten far rauba de gran honor, [bar.
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LB ROMAN D’ARLES 05
Que la porte per la vostra amor, e si el non la vol despular,
Pregas l’en qu’el o dega far. » Aychi con lo chavalier o dis
Sezar o fes. Aqui mezeis a sos cavalies et a sos escudies a co-
[mandat
Qu’els s’en anon per la sieutat e que li degan aportar del
375 plus bel drap qu’els poyran trobar. Aquels senhos s’en son
anatz per la sieutat, e van trobar .j. drap quefon meravilhos.
Amb els menavon los sartres. A l’enperador Sezar s’en van
anar e van li lo drap aportar. E cant el a vist lo drap tan
bel, ez el comandet c'ora fezes la plus bêla rauba que sie en
380 tota esta sieutat. [F° 36 v°] Quan la rauba fon facha, e
Tan la li mostrar; mot bêla es la rauba, tôt hom la pot portar.
L’emperador la près, el meteis lan portet en son pa-
laysez en sa cambra la mes; .ij. quavalies sonet; los cavalies
vengron e va lur comandar : « Anas mi quere en Pilât que
385 anb el vuelh parlar. » Li cavalies si mogron, ves Pilât van
anar. Gentilmens lo saluderon e van lo razonar : « Le
noble enperador anbe vos vol parlar.» E Pilât si va moure,
anb elfs] s’en va anar. Mot ben lo saludet Sezar, per el si
valevar, près loper laman,justa se lo fesasetar; pueys
390 sonet sos escudies e va lur comandar: « Non vos partas
d’ aychi, e veyres que ieu faray. » — « En Pilât, servit lonc
temps m’aves, ma terra d’otra mar de Jherusalem gardada,
e mot ben la vos es portatz, ez encaras non vos ay de ren gui-
zardonat. Mas aras vos o seres per sert; prenes d’aur e
395 d'argent aytan con vos ja en volres, et aquest bel ves-
tir que vos ay fag far, per amor de mi e vos lo portares. »
— « Senber, per Dieu, grans merses. » — « Sapias, dis
l’enperayre, per cert aquesta rauba per la mieua amor e vos
portares, et aquela que vos portas e vos despulares. » —
400 « Senher, plasa vos que aycho vos non degas voler; pron
ay d’aquesta rauba autra. » — «En Pilât, ieu vos prec per
l'amor que vos mi tenes, que aquesta rauba e vos vestas
ades. » Aras parlet Pilât tôt malesiosamens que « si
ieu en saupes tant, yeu fora encaras en Jherusalem. » —
405 « Aras vos despulhas, que a far vos aven. » En Pilât si des-
puelha, don ac dolor mot grant, car li covenc a far, e
le cor dolent. Quant el ac despulat lo vestir del profeta
Jésus, et el remas plus negre que corp [F 0 37 r°] ni que
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?ô LB ROMAN D’ARLES
caüs. L’enperador lo regarda e va lo blastemar mot fort,
410 e dis a sos sargans. « Prenes aquel vilan, anas lo estacar
per pes, per mans, que el non puesca moure ni gasar,
tro que nos siam vengutz de la forest quasar. » Àdonc s’en
anet l’enperador en la forest quasar. Pilât s’esperdet, va
si dezesperar. Tant si det de la testa a .j. pilar que
415 tota la si va brisar. E cant l’enperador venc de la forest,
ez el lo regardet, e vi qu’el si fon mortz, e a (a) sas gens
comandet: « Fas l’en tost foras tirasar et a la força
trainar e pendre e ben liar e estacar, que lonc temps i
estie per las gens a mostrar, qu’el o a ben gazanhat, que
420 aquest a vendut lo sant profeta als jurieus e per déniés do-
nat. » Tantost las gens lo prenon, van lo far tirasar entro
al pe de las forquas, e van lo sus tirar. E cant l’agron
mes sus, mot fort l’an fag liar, que lonc temps i estes per ey-
semple mostrar que aquel era Pilât, que avie Dieus vendut
425 ejujat e lieurat als jurieus que l’an cruzificat. Pueys
quant aycho fon fag, l’enperador va sonar lo cavalier gentil
e va li consel demandar: « Digas mi, cavalier,* e con
o poyrem nos far? Irem vezer mon fil Articlam? » —
«Hoc, senher, anem lo vezitar, e tost e leu, que ben o de-
430 yen far. » L’enperador raoc an gran gent, a Fregus s’en
va anar. A la tore s’en vengron on era Arteclam. Tan
gran pudor n’isi nul oms non s’i pot estancar. L’enpera-
dor fon aqui, lo cavalier va sonar: « Digas, cavalier, ay-
cho con si pot far? Tant gran pudur ieis de lains que non
435 si podem estar. » — « Senher, non ne aias esmac, que non
vos quai duptar. Fas mi far en [F 0 37 v°] maniera que la
puesca montar sus en aquella tore, que li puesca mos-
trar a vostre filh la vestimenta de Dieu, e tantost o fas
far. » E cant fon fag, le cavalier s’en montet sus la tore,
440 le vestir va liar sus .j a lansa, pueis lo va demostrar
sobre Articlam. El si va regirar, e de la gran clardat qu’el
vi si va ajunelhar, e benezis Dieus nostra senlior e fort lo
va lausar. Trastotas las vespas tantost s’en van anar.
« Senher Dieus Jésus Crist,benezet sias vos e lauzat, que vos
445 m’aves garit e del mal deslieurat. S’ieu vostra mort non
venge, ren non me sie perdonat. Pilât vos a vendut als ju-
zieus e per déniés donat, e pueys los trachos juzieus vos
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27
LB ROMAN d’àRLES
a[n] a mort lieurat. Sapias, Jherusalem, vos o comprares
car, que per vos destruire en pasaray la mar. » L’en-
450 perador l’auzi, entendet lo al parlar, gran gracias en fa a
Dieu e va s’ajunelar. Sonet totas sas gens e va lur coman-
dar: « Rompes aquelatore, anas la tost trancar, que
mon fil Articlam ay fort auzit parlar. » Cant la tore fon
trancada, eisi foras Arteclan, e cant els lo viron, tug s’en
455 van alegrar. Lay on el vi son payre, s’anet âjunelhar.
L’enperador l’esgardet e va li demandar : « E iest tu
mon filh Ar te clam, que ieu non t’avie vist mais avie de
•vij. ans? » — « Senher, oc, que dieus m’a trames .j\ gran
clardat de la]sieua vestimenta,que m’a totalumenat;
460 per que yeu [F 0 38 r°] vos quere .j. don; plasa vos que sie
donat. » — « Bel fils, tôt cant tu volras te sia autregat,
que puescas far lo pasage per anar otra mar. » — « Plasa
vos, senher, que degas ajudar, car ses vostra ajuda ieu non
poyrie ren far.» Aras s’en tornet l’enperador e trastota sa(s)
465 gens, et Articlam amb els, son fil, que Vesperiam l’apelet,
el gentil cavalier quel consel li donet. Quant foron en
la sieutat de Roma, l’enperador comandet que faren d'Arte-
clam, dig Vesperiam, tota sa volontat. Aras esteron del pa-
sage a far tro que son filh de Vesperiam, Titus, fon de tal
470 de geregar. E cant fon de tal, e lo mal fon tornat a Ves-
periam, car el avie estât del passage a far. Lo senescal
don Joan otra mar va mandar per quere medesina que lo
pogesa far sanar. Sel adus .j\ fenna mot caramens, quez
avie a nom Vezona, qui aportet la benda de Nostra Dona, que
475 s’apella verorica, de que fon torcada la cara de Crist e es-
format lo menton e tota la facia de la profeta Jésus.
E cant fon tornat don Joan, el en va(n) a Vesperian la cara
tocar e la sieua persona, e el fon tantost garitz e sanatz,
que anc non fon oms el mont plus san que el fon ni plus
480 garitz; e tôt aquel escalh li caret, aysi con si el non sen-
tis nul temps ni mal ni dolor. De gens fes venir mot per
far lo sant pasage, et en Jherusalem van tener tôt dreg,
que anc juzieu non n’escapet que pogeson [F 0 38 v°] vezer,
ni en tota la tera quere ; e tota la sieutat fonderon, que anc
485 ren non i remas, mas sol .ij. destres, que trastot non fon-
deson e non ânes a bas, sal lo temple Salamon e lo cor on
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2* LE ROMAN d’àRLRS
lo sacrifizi si fa, e .j. penon del temple que es’dou soleil
colcant. Ane aquel non fonderon, tant es bel aquel pant.
Trastotz losjuzieusvanausirequeelspogron trobar, • fo-
490 ras aquels que fugon ni si pogron salvar, e totas las vilas
que els tenien fondre et afugar. Non remas . j\ d’en pes
non l'aneson cremar e totas degolar. Quant Yes peri&n ae
fag fondre las vilas e los bors e las sieutatz els jurieus totz
ausitz, anc .j. non remas, tomeron en Jherusalem, al tem-
495 pie vananar per Jesu Crist orar, e^maldis los jurieus,
que mays non la auron estar ni en la tera de Jherusalem
non auron venir ni abitar; qui qui los i poyra trobar
que om los puesca ausire, ses pena e ses costa que non
deiaaver ni sufrir ni ren costar, e de Dieu si perdonat qui
590 los poyra penre e losfara totz, los desliais jurieus de Dieu
e de nos sien escumenegatz e maldigs. Amen.
Quant Yesperian e Titus ac conquista la tera d’otra mar e
de Jherusalem, gentils li queregron la vila de Jherusalem,
e el va la lur donar et autregar, pueis s’en torneron en
505 Roma, a la nobla sieutat. E cant son payre lo vi, el li a de-
mandat: « Digas mi, fils, con aves tant estât? han vos
ren los fais jurieus contrastât ni desvedat la tera que
[P°39 r°] non la cias intratz? » — « Non, senher, que ben los
n’aven totz gardatz, que fondut es Jherusalem , que ren
510 non l’avem laysat que tengeson jurieus, que tôt non sie
cremat e davalat e los jurieus totz mors. .1. non n'es escapat,
foras aquel que sonagutz .xxx. per.j. denierdonatz. Que
los n’aura volgutz nos Ion avem donat. Dieus an vendut li
trachos renegatz .xxx. déniés d’argent, quez els m’o an con-
515 tat.» — « Fils, vos aves ben fag, quar Dieus n’aves vengat.»
Hadons l’enperador en son palais el fes venir totz los
melhos de Roma, el va lur aqui dir : « Bels senhos, ieu vos
ay mandat totz quere. Pos que mon filh es vengutz, vole
que anem vezer la terra de l’emperi. » — « Totz o devenu
520 voler, senher, si vos o voles; ben n’avem bon plazer.»
Adonc foron las gens de Roma an l’enperador Serar. El fes
sonar son filh e va li dir e comandar : « Fils, gardas ben la
tera, que ieu m’en vuel anar. » Aras s’en va l’enperador
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LE ROMAN D’ARLES *9
Serar an trastota sa gent, e va lur demandar : « Ana-
525 rem entro la sieutat d’Arle, a la segona Roma, que la de-
yen- anar. » L’enperador venc as Arle ; al davant mot
gentils li van eysir, mot grant hono(no)r li feron, ben lo
van aculhir. Tôt sert ben lo van aculhir Elegos, Barbis
ben e fort atresi, e van ves luy, an tota la gent de la sieutat,
530 li van deforar eisir. Quant l’enperador fon en la sieutat,
mot i près gran plazer. [F 0 39 v°J « Mot es plus fort
que Romaaquest luoc, per mafe. » Xx ans estet ar Arle l'en-
perador, que anc non s’en parti, tant li fon bels lo luoc el
palais Contastin. L’enperador mandet quere lofs] plus viels
535 homes d'Arle e va lur demandar: a Digas, vos autres, nen-
guns encartamens aves d'esta sieutat? Del premier bas-
timent quant a de temps de l’acomensament? Qualâ foron
los premies que van acomensar de bastir aquest luoc ni l'an
anonciat ?» — « Iij. m. e .ccccxlviij. ans, senher, a que
540 gentils comenseron de bastir las arenas, e lo luoc a non Ge-
rengost. Gregs, Vandaiins, ElerïÇos, Barbis atresi(s),
pronn’i avie, segon que conta nostres escrits, que bastiron
la sieutat d'Arle e Roma atresi. » Quant l’enperador fon as
Arle, sant Trofeme li venc per las gens prezicar, la santa
545 fe de Dieu a la gent demostrar, qu'el prezeson crezensa
ves Dieuse batejar. Ar preziquet mot fort per tota la sieutat,
la gran vertut de Dieu lur a ben demostrat. Ganren hi ac
d'aquels que o prenon en grat, e li autres en feron grans
esquers. A l’enperador van mandar que lo en fasa gitar,
550 o lo fasa liar o lo en fasa menar e que lo fasa pendre,
quar el los vol enganar. L’enperador mandet quere sant
Trofeme e va li dire: a Digas, Trofeme, eras tu dicipol del
sant profeta quel jurieus an ausit? » — « Senher, yeu era
son dessipol ; non m’en vuelh escon-[F° 40 r°]-dire ; et en
555 esta sieutat soy vengut per la gent prezicar e convertir;
plasa vos, senher, que vos mi deias aculhir, que puesca far
. j\ gleira on Dieus puscan servir. » Quant l’enperador auri
de Dieu parlar,tot cant le ques sant Trofeme li anet autre-
gar, e la gent de son ostal es el li fes venir. Cant li fo-
560 ron davant, a totz emsems va dir : a Aquest bons homs m'a-
culhes, e tôt quant vos quera e vos autres li dares.
Totz sels qu’el poira convertir en mon ostal puescan venir,
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80
LB ROMAN D’ARLBS
qu*el era dicipol de Dieu, d’aquel que an mort li jurions,
que mon fil a garit e sanat e de las vespas deslieurat ;
565 per que li daray on puesca far gleira e la gent batejar,
quar aital avem nos en Roma, 'quan vos autres aves dig,
tot[z] sels qu’el poira convertir ves Dieu e sas obras tener. »
L’enperador son palais li vadar, on pogesa far gleira e la gent
batejar, qu’el poira convertir et a Dieu gazanhar. Pueis
570 fes venir totas las gens e va lur comandar: «Non fasas mal
a Trofeme, laisas lo aisi estar, que ieu Yen don poder que
puesca prezicar per trastota ma tera e la gent perdonar
que volran en Dieu creire e si volran batejar. » Si l’enpera-
dor si part d’aqui, ja non o volran far, qu'el non crezon en
575 Dieu ; idolas van orant, mas lo bonshoms san Trofeme els
van fort menasant. L’enperador lo rei Aras fes venir, lo fil
de Magin,que las arenasfes complir, que li sovenc de gen-
tileza, ac mot de gent an si, e lo rei Carbonier, que i venc
de Galia per abitar aqui, an sa moler [P° 40 v°] Boriana, fila
580 dal reyAugin, Bone^de Tartaria, el comte Agarin, e
lo rei Audegier, el fil(i)s del rey Ermin, lo rei de la True-
lha, el coms Bigart, el rei Galic, el rei Autan, am
motz d’autres barons am si. Tug am perpres la tera, gran[s]
forsas an bastit, lo plus fort bastiment que sie sot lo sel es
585 aqui. L’enperador s’en tornet en Roma la sieutat, am totz los
melhos ornes d’Arle que l’an acompanhat. Per vezitar
l’enperi, az Livon son anatz. Aqui estet mieg an en aquela
sieutat d’Aiavon. Pueis s’en anet per l’enperi, a Roma
va repairant. E cant el fon de prop, a son fil Vesperian,
590 dig Arteclan, va mandar qu’el fezes la sieutat mot ben
aparelhar. Qua[n]t auri son fil,tantost el o fes far.
Quant l’enperador intret en Roma la sieutat, los sieus n’an
meravilhas, quar el venc tant fort acompanha(n)t. Àquels
que foron d’Arle el los va totz retener ; non los en layset tor-
595 nar; tant los près en plazer,volc qu’els estesan en Roma
la tera man tener. Totas ves i esteron, anc nonpogron issir
ni partir de la terra de Roma ni ad Arle venir.
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LH ROMAN d’aRLBS
81
III
Mot foron sarazins ad Arle abitar, quar viron quels milhos
s'en son anatz. Sarazins van penre Arle e Masela y
600 et Avinhon, Narbona e Nemze, Aurenga,
Eilavon, e totz los autres luocs que estan en viron.
[F° 41 r°] Si an estât sararins desa mar, tro que dieus
Qarle Maine quels anet dequarer ; quar li font contât a Paris
la sieutat la gran nob[l]ezad’Arle, per la plus fort sieutat que
605 gie el mont... ni mais de malvestat, qu’els non crezon en
Dieu ni en la crestiandat. Quant Carie Maine au ri contar
las novelas, en anet comandar Alamans e Franses,
Engles eBorgonhons, e Picars e totz sos amix : «Bels
senhos, si vos plas, anas vos tug armar, que az Arle lo
610 Blanc nos coven tug anar. » A Paris son vengutz tug mot
ben aparelhatz, ganren de noblas gens, aysi cant o a
comandat. Carie Maine si mou da Paris am los nobles ba-
rons, els.xij.bars de Fransa, an totz los companhons.
Davant Arle lo Blanc es vengut lo barnage de tota
615 Fransa, mot ben acompanhat. Al pe d’una montanha .j«.
vila an trobat, que a non Fréta. Tantost l’aneron fondre,
que res non n’escapet. Aqui s’acetieron ; ganren (gan-
ren) li an estât, tro que agron reconeguda la tera els pa-
ses regardatz. E Carie mandet a Tibaut qu’el venqua
620 a fizansa, que non li cal duptar. Quant Tibaut auri lo me-
sage que Carie li a mandat, sonet sos cavalies ez a lu[r]
comandat: a Anem a Quarle, que nos manda quere ;
moves vos tug ez anem lo vezer, e veiren si son gaire, sil poi-
rem conquerer. » Lo rei Tibaut s’en anet, an de sos qua-
625 valiers, [F® 41 y°] a Carie Maine, lai von non el lo atendia.
Lo rey Carie lo vi venir, vai si levar e vay lo aqullir:
« Rei Tibaut, ben volgra, si a vos plages, que cre-
zeses en Dieu e vos batejases, quarcrestian i agranbon
amie, si vos far o volses. » — « Carie, vos ni vostra batejar
630 non preze .j. poges. Carie, so dis, Mainier, si vos m'en
crezeses, vos vos en tornares an vostres companhons, que
plus non sa estares. » Los .xij. bies de Fransa si van fort
quorosier, quar viron que Tibaut non si vol bategier.
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as LB ROMAN D* ARLES
Rolant va dire a Carie Maine : « Senher, laisas lo anar,
635 que nos volem batalhar ; anon si aparelhar. » Lo rey Ti-
baut o auzi, près s'en a retornar. Tibaut vay dir mot ergo-
lozamant, am quor irat, plen de mal talent : « Anquaras
vos valgra mais quez en Fransa foses que car es vengut say,
que mais non la tornares. » Ar fon Tibaut ar Arle tornat;
640 totas sas gens fes venir e a lur comandat : « Armas
vos tug que a far vos coman ; anas penre Carie Maine an
trastota sa gent. Xxx. m\ per aisi vos n'ires, vos autres
.lx. m\ per .ij. partz vos n’ires, que, s’il fugon, vos autres los
penres. » Ar s’en van .xxx. m\ sararins batalhar
645 an Carie ez an sas gens. Dieus lur deia ajudar, que nengun
sararin non lur puesca mal far ! Carie los vi venir, anet
[P* 42 r°] los avizar : « xxx. m a . son, que ieu ben los ay con-
tatz. a Ar foron los sararins an los crestians ajustaz. De
.xxx. m*. sararins non es .j. escapat, quez el los an totz
650 mortz ; gayre non i an ponhat. Carie sonet sas gens e va
lur demandar: « Digas mi, bels senhos, con o poiren nos
far que aquestz sararins non nos puescan enganar ? »
Poure Noirit auzi de Carie Maine parlar, e de Olevier son
paire, e totz los .xij. bars. Fils fon de Blancasflos, la
655 sore de Tibaut. Poure Noireit va dire a son oncle: « Sen-
her, laysas la mi anar, per vezer Carlemayne e totz los
.xij. bars. Se conosc Olevier, el o comprara car. »
Cant o auzi Tibaut, li o anet autregar. Quant Poure ven-
gut fon a Carie, an son oncle Tibaut, per la ost Carie
660 Maine de gran[s] sautz mot fort va escridant : « Von es
Olevies e Rollant nils .xij. pies de Fransa? Totz non los preze
. ja. glant. » Cant o auri Tibaut, fort s’en va alegrar*
«Si trobe Olevier, sapias qu’ieu lo fera y, e mablanca en-
seina per son cos bauestray. Si blanca lali mete, verrae-
665 lha l’en trayray. » Entre las dens a dig : « Mot ben m’en
gardaray ; ans si on lo fer, ieu lo revengaray, e si es
a pe e ieu lo montaray. » .T. paian o auri, de Dieu sie el mal-
dig; a Tibaut va [P 42 v°] contar so que l’enfant a dig.
Rollant, cant l’auri, tost anet li demandar: « Que as,
670 paian? que venes tu contar? » — « Rollant es Olevier, que
anb els vuel parlar. Senher, si vos plas, feses los mi ve-
nir. » — « Qui es tu? que demandas ?» — « Rollant e Ole-
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LE ROMAN D*ARLES 33
vier; de Blancaflor fui fils e soi fils d'Olevier. »
Quant o auri Rollant, mot fort s'en alegret. Anet lo penre
675 per la man, a Olivier lo va menar. Quant lo vi Olevier,
grau gaug va menar ; anet lo costa si asetar, la boca li
bairet : « Fils, ben sias vos vengut, que anc mais non
vos vi; si Dieus m'ajut nil sans, ben vos fa bon aculir. »
— « Paire, en vos non es prodomia ni nenguna bontat.
680 An las vostras paraulas ânes ma maire enganar ; vos
li feres entendent que per molher la penrias ; aras non la
voles, don en so y fort irat. jo — « Fils, bategas vos, suis
sans vos juraray per molher penray vostra mayre. » —
« Aycho vos prometray, pensas de ge^egar mon oncle, quez
685 ieu vos ajudaray. » Poûre agut s'en anet retornar.
Quant son oncle lo vi, li anet demandar: « Don venes tu?
Yoles mi enganar; perla lei de Maon, tu o compraras
car.» Tibaut sonet .ij. paians e va lur comandar : « Prenes
aquest es anas l'en menar ; metes l'en luoc non s'en puesca
690 anar. »
Quarle Maine an sa gent s'en anet, sigi lo per detras.j*.
montanha, qu'el anc non s’estanquet, tro qu’el fon ad .j.
pont per on l'ayga venia, que anava ad Arle a la gent que
bevia. Quarle Maine comandet a Rollant qu'el montes
695 sus l'engarda, s'il vira puegs ni plans, que âges sararins ni
nulha autra gent. Rolant fon sus l'engarda, sa e la regar-
dât. Al pe d'una costa regarda e vi venir penons e senie-
ras e motz de sararins. [F 0 43 r°] Rollant los reconoc,
mot ben los a contatz, als penons ez a las senhierâs, a pe
700 et a quaval. En auta vos a la ost a cridat : « Armas vos,
bels senhos, estas aparelhat, vevos .xxx. m“. sararins, que
ben o ay contât. » Rollant s'en deisendet, son caval
demandet; lo garson l'ac aqui, tantost et el montet.
Li sararins a Carie van mandar per .j. paian: « Quarle,
705 voles ti rendre o ti voles batalhar? Ren ti, Carlon, am
trastota ta gent, ren ti a nos, que a far ti coven. » Quant
o auri Rollant, anc non fon plus irat; vai trayre Du-
rendart que li pent al costat ; luy an son caval va partir
per mitât. Adoncs si van ajustar sararins e crestians;
710 la batalha si fes ; ben (hi) s'i portet Rollant et Olevier de
Verdum etug los .xij. bars. Tant an ben tugferit anb
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84 LE ROMAN D* ARLES
aquellos crestians, nul non n'es escapat de la pagana gent,
foras .iij. que fugiron. A Tibaut an contât : « Mo[r]t son
los .xxx. m®. que l'avias mandat. Si foram ben nos autres,
7X5 ails acsem agardat. » De crestians moriron .y. c., que
morts que nafratz. Quant la batalha fon facha, volgron li
crestians penre refrescament e reconoyser lur gents. Iij.c. en
troberon mortz e .ij. c. de nafratz. Mot foron desbrasatz li
crestians e briratz. Olivier s’en anet, a Carie a contât:
720 a Senher Karle, si vos plas, vostra gent fas armar ; paor
ay que autra batalha nos covenga a far. » Quarle Mayne
anet per la ost, a totz los .xij. bars de Fransa, comandar a
la gent que estien aparelhat.a Ij. batalhas aven agudas, que
Dieus en [F 0 43 y 0 ] sie onrat ; def .lx. millia nos em deslieu-
725 rats. » Quarle Maine ves la sieutat d'Arle vol tener ;
regardet ves .j. bosc, penons, senieras vi venir; .xxx. m\ sa-
rarins vi venir e de dins .j. bosc eisir. Quant Rollant los
vi, s'en va meravilhar: « Santa Maria dona, son tornatz
vieure aquestos cans. Tant non podem ausirë mais non
730 nos en vengon davant. » — « Senhor, dis Carie Maine,
aras fasam que pros ; luocs es e forsa que tug siam coragos.»
Quant los sararins foron dels crestians apropiatz, gran
géra demeneron, mot fort an grailejat, an trompas, an
tombalas menavon lur afar, per so que la gent crestiana
735 pogesan espaventar. Alimon si va levar, cozin fon de Ti-
baut, ves la ost de Carie Maine s'en anet de gran saut.
Ben fon aparelhat, ren non i ac que dir. Rolant lo vi,
ves el s'en va venir: « Que queres tu, pagan, c’aisi venes
arditz? » — « Quarle demande, Rollant es Olevier. So
740 lur comanda Alimon vengafn] an mi parlar. Lo rey Tibaut
Mavon m'a fag jurar que li mene Carie Maine e tôt los
.xij. pies, e totz los autres ieu fasa pendre o los fasa ei-
sorbar. » Quant auri Rollant, .j.falris va gitar, va
traire Durendart e feri Alimon, que tôt .lo fendet entro
745 fin de l'arson. Quant li paian o viron, gran dol an menât.
An la ost Carlemaine s'en son totz ajustatz. Aqui vi-
ras far colps de masas e d’esparas ferir, que farian los cres-
tians els sararins atresi. La batalha fon facha, mor son lo[s]
sararins, nengun non n’escapet que non moris aqui ; e dels
750 crestians moriron [F 0 44 r°] .ij. m\ atresi. Quant la ba-
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Lb roman D*ARLË8 ?5
talha fon facha, tug si van apelar, * e van levar lo camp.
Ren nonlur cal duptar. Can lo camp fon levât, Quarle
Maine va dir : « Anem non per desay, segam aquest ca-
min, que ieu veg say .j. castel ; pasem non per aqui.»
755 El camin si son mes, al castel son anatz. Al castel de Bi-
gart son vengutz, ren non l’an atrobat. Trastot l’aneron fon-
dre, que ren non i remas. Ad Arle van anar, entrol cas-
tel Garin non si van estancar. De la gran gent qu’el i vi
Carie si va meravilhar, e dis Carie : a Dona santa Maria,
760 ayso con si pot far? Tantas gens sararins von podien abi-
tar ? » Regardet sus los mus del castel Agarin, ganren hi
ac d’aquela gent pagana. Mot ben foron garnitz. Nai-
mes de Baivieras va dir a Carie : « Senher, si Dieus ma-
jut, lains non n'a plus gis mas selas que son desus. »
765 Très jors batalhet Carie lo castel Agarin. De sus los mus
feron moure trastotz los Sararins, e quant tug ostatz fo-
ron de sus, Carie fes amenar, de los mus .j. gran pan ane-
ron derocar. Quant los sararins o viron, trastotz s’en van
ad Arle anar. Per desotz tera si van tug pasar. Ad Arle
770 s'en aneron.Aqui salva[r] si van. Quant foron los mus fon-
dutz, las gens la van intrar. El castel Agarin res non la
van trobar. Las gens agron meravilhas que foron sels
dedins devengutz, quar non avie gaire quez eran sus lo
mur. Tôt lo castel fonderon ; nengun mus non i remas que
775 tôt non fondeson, an[c] ren non i remas. D’aqui si van
partir, ad Arle van anar. Quant els foron davant Arle,
[F 0 44 v°] si van meravilhar. Tant fort fon la sieutat non
Taureron intrar. Ane la ost de Carie Maine non si auzet ajus-
tar. D’aqui on era Carie a vist Tibaut (est) estar sus
780 las fosas de las arenas. La ost de Carie Maine Tibaut van re-
gardar; pueis si parti d’aqui. Carie va comandar a las
gens de la ost quez aneson trencar lo pont per on l’aiga
venia a Arle lo Blanc, de que las gens paganas bevie[n].
•M. ornes si van moure, al pont s'en van venir, per franher
785 lo pont 0 l’ayga retener, que aquels d’Arle pagans non pu-
escan ges aver. Quarle Maine s’assetiet davant Arle.
Aqui lonc temps estet, tro que los sararins non agron von
pogeson anar, ni agron vitala que pogeson manjar.
Quant Tibaut vi que plus non si podien tener ni de vitalha non
*
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U La ROMAN D* ARLES
790 podien ges aver, va dire a sas gens: « Que voîraremaner
remanga; que ieu m’en vuel arar a Marsella, dire a
mon corin lo rei Marcile que Carie Maine es aisi e totas mas
gens a mortas, e si cuja el far mi ; mandarem en la Tur-
queza ez al rei de Suria e de Bogas atressi et a trastot(z) mon
795 linhage que totz los sararins que el poiran atrobar fasan
venir aisi. » E la nueg, cant la ost de Carie estava a re-
paus, e la nueg fon venguda e lo jorn s’en fon anat,
an .iiij. companhons s’en isi Tibaut mot secret ; a Marse-
lha s’en anet. Tota nueg an anat, lo rey Marcile son co-
800 rin a trobat ; tôt cant Carie a fag al rey o a contât.
Lo rey Marcile e Tibaut oti*a mar an mandat a totz los
reis que la son que lur venga[n] ajudar, que los crestians
los volon de tôt demasipar.
Carie fon asetiatz denant Arle lo Blanc, e denant luy es-
805 tet Olevier e Rolant, am totz los .xij. pies de [P° 45 r°]
Fransa es am tôt los bars ez am totas sas gens. Iij.ves lo jorn
Arle van batalhant. Ix. mes va estar Carie davant asetiat ;
anc non sareron porta, tant son aseguratz. Si sol vitalha
ils pogeson pron avèr, nuis tems crestians non agran Arle
810 en lur poder. Quarle fes- tant quels anet asignar que
quavals e rosins aneron tôt manjar. E cant non agron plus,
aneron perpensar que, quant los crestians irien far lur
pasada (que lus pasada), que lur iscan al denant. Quarle
an sas gens ad Arle van anar e van lur dar batalha. Aquels
815 dedins van deforas isir ; an los crestians si feriron.
Ben los van aculhir, totz los sararins van ausire, nengun non
n’escapet. Pueis Carie Maine dins la sieutat intret, an tras-
totas sas gens que la volgron intrar, per vezer la sieutat el
rey acompanhar. Quant Quarle Maine fon dedins la sieu-
820 tat d’Arle lo Blanc, .vij. mezes lan estet. Quant l’agron
est[at] .vij. mezes, los crestians fes venir davant si en la plasa,
a totz ensems va dir: « Bona gent, yeu m’en vuel anar a
Paris ; anar m'en coven la, c’om me a mandat quere ;
e remanga qui remanervolra. Totz los camps sien vostres
825 per far vostra volontat. »
Aras s’en anet Carie en Fransa a Paris. Xv. m a crestians
remaron per Arle gardar. Tibaut s’en paset otra mar,
el rey Marsile atresi, per quere al Saudan ajuda et a totz
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37
LE ROMAN D* ARLES
los sararins. Tant de gent sararins s’amenet non fon
830 comte ni fin. Ad Odor ariberon las naus dels sararins.
Quant foron tug en tera de la Crau, an perpres de los
[P° 45 v°] mu ysalons de l’aire non van tant espes. Ad
Arle s’en van la sieutat batalhar. Quant los crestians los
viron,fort si van espantar.Tot entorn la sieutat si va(a)n ase-
835 tiar, per so que nuis crestians non s’en puescan anar. Iij.
mezes van tener, que non van refînar, ni la nueg ni lo jorn,
los crestians de batalhar, per tal que se asuavon el fe reson
dormir e calar. Luen de la sieutat d' Arle Tibaut va far ca-
var ; va trobar los alages desot tera per on podian ad Arle
840 intrar. 1. dimars a la nueg sarrarins van intrar ; per desot
tera ad Arle van intrar et anar. Quant los crestians los vi-
ron, si van meravilhar. « Santa Maria dona, ayso con si
pot far? Aquestz fais sararins per on sa son intratz? » La
batalha fon grans, de denfra la sieutat, dels crestians an los
845 sararins que la eron intratz. Quant la batalha si fazia, trastotz
sels de foras s'en van intrar, sels que eran deforas, els
crestians batalhar. Ij. jorns duret la batalha, quez anc non re-
frenet, dels crestians et dels sararins. Crestian non n’es-
capet. Avans quels crestians morison, mot ben si van por-
850 tar. De .lx. m\ sararins s’âneron deslieurar. Ij. ans avien
tengut crestians Arle e plus l'avien estât.
A Carie Mayne a Paris fon contât quel rey Tibaut ac Arle
recobrat els crestians totz mortz ; .j. non n’es escapat.
Quant o auri Carie Maine, el en fon mot iratz. Mandet en
855 Alamania totz los melhos querer, de Gascuenha, de Picar-
dia, [F 0 46 r°] de tota Fra'nsa atresi; Borgonios et Alver-
nas trastotz vengron a Paris, per anar ad Arle lo Blanc.
« La nos coven venir. » Am .1. m\ crestians mot ben garnitz
s’en anet Carie Maine ad Arle en la sieutat, Rollant et Olevier
860 e de Fransa trastotz los bars. Quant foron davant Arle se
▼an asetiar. Carie Maine fes establir tôt entor la sieutat
els pases ben gardar, per on eran intratz. Carie Maine
a Tibaut va mandar qu’el âges crezensa en Dieu e si volges
batejar, e si non la batalha li coven de far. Cant Tibaut
865 auzi lo messagier que Carie li a mandat, tant ac de mari-
ment que tôt s’esgaimentet. Del[s] mus qu’el vi trencatz per
pauc non desenet. El mandet en Espanha al rey Corbaran
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38 LE ROMAN D*ÀRLES
qu’el donon batailla a Carie, a qu’el nos fa mot gran dan.»
A Carie Maine fon mandat a Paris qu'el tantost s’en
870 ânes, per ren non remares, que Corbaran de Pesa e .iiij.
reis sararins an mandat defisansa a Carie a Paris. Ad Arle
venc lo mesage recontar las novelas dels sararins, que a Pa-
ris van mandar; e Carie Maine los crestians fes venir el
plan de la sieutat, a totz* ensems va dir: « Bonas gens,
875 anar m’en coven a Paris ; remanes sa .xx.m a .; los autres
anon s’en an mi. » Cant Carie Maine fon tornat a Paris,
en Ronsasvals fon gran lo camp dels sararins. Ti-
baut cor fes graylegar, sararins fes venir. Cant foron
[F° 46 v°] acampatz, a totz ensems va dir : « Senhos, ar-
880 mas vos tug, anem foras issir. Quarle Maine e sas gens po-
dem trastug ausir. Nos em ,lx.m a .; fasam .iiij. pars, quels
metam totz en casa, que non puescan fugir.» Tibaut va isir
foras am totz los sararins; per .iiij. partidas a la ost dels cres-
tians van venir; .xv.m\ sararins am los crestians van ferir.
885 Aychi con si batalhavon, per .iij. partidas los autres van
venir, am los crestians si feriron los malvais sararins.
Mot fon gran labatalha, engoisozae pezantz. Ar coven que
fasa que pros Olevier e Rollant, Naimes de Baivies, e Gandel-
bu et Augier lo vilan, am totz los .xij. bars e totas las sieuas
890 gens. Gran brega fon davant Arle lo Blanc, que fazien
los sararins an los crestians valants. Mot ben si van por-
tar Olevier e Rollant, e Naimes de Baiviers e totz los .xij.
bas. Que atendie lur colp plus non anava avant. Aqui
viras abatra Sararins e cavals, testas e cambas e brases
895 davalar. Mot ben van tug ferir an los autres crestians.
Lo cons Bertran Tibaut va encontrar; tantost cantel
lo vi, lo vay araronar:« Voles ti rendre, Tibaut, .o ti voles ba-
talhar ? » Quant o auri Tibaut, tantost si va girar : «Qui
jes tu, que demandas si mi vuel batalhar?» — « Li coms
900 Bertrant mi sol om apelar; non say si plus o seray, Dieus
m’en puesca ajudar. » — «Conte Bertrant, mala ti iest uey
levât; sapias per sert ades n’en perdras lo cap. Rol-
lant ni Olevier non t’en poira gardar, ni Naimes de [F°47 r°J
Baivies, ni totz los .xij. bars, que ades tu non moras ;
905 ren non t’en pot ajudar. » Quant o auri lo coms, mot fort
en fon iratz. Va dire a Tibaut :« Malvais can renegat, non
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3»
le Rouan Parles
a baron en Fransa si fos tant anantat. Per sel dieus que
m’a fag, nuis temps non'mangaray tant cant ti sentray vieu,
o arle non poiria. » Mot gran fon la batalha d’andos en
910 Aliscam, davant Arle lo Blanc, prop del pont canones.
Tibaut va ferir d’una masa Bertran lo coms per las espàlas,
que tôt anet avant. « Santa Maria dona, so dis lo coms
Bertrant, dona, das mi poder sobre aquest pagan. Tan
gran colp m'a ferit sest malvais mescreant. » Le coms
915 Bertran Tibaut va ferir fort, fes li .j. colp d'escrema que apres
a Paris, que l’espara el bra(n)s fes en tera quarer.
Quant Tibaut ac perdut lo^bras, er el s'en va fugir ; del
gran sanc qu’el perdia en tera va quazer. Adoncz moriron
.lx. m*. Sararins e des crestians .x. m\ atresi. Quarle
920 Maine s'en va ihtrar en la sieutat d'Arle; .j. an la va estar e
poserir, per vezer si nuis sararins la volgran mais tornar.
A Carie fon mandat da Paris que tantost s’en ânes, per
ren non remares, que Corbaran de Pesa e .iiij. reis sara-
rins an mandat deffiransa a Carie a Paris. Ad Arle venc lo
925 mesage a Carie recontar las novelas dels Sararins, que a Pa-
ris avien mandat. Quarle^Maine los crestians fes venir el plan
de la sieutat, a totz emsems va dir : « Bonas gens, anar
m’en coven a Paris. Remanes say .xx. m* ; los autres s’en an.
non an mi. » Quant Carie fon tornat a Paris, en Ronsa-
930 vais fon gran lo camp dels sararins. »> Lo rey Corobli ez an
trastotz sos fils a Maselha son vengutz, al rey Marcile an
[F 0 47 v°] dig que mort era Tibaut e totz los sararins, que
Quarle e sas gens los avien tug ausitz. Corubli s'en paset otra
la mar et Autaves son fil, al Saudan contar las novelas de
935 Tibaut e dels sararins, que Quarle e sas gens los avien tras-
totz ausitz. Lo Soudan de Babilonia manda tantost quere
totz losjreis sararins, que degesan venir en Jerualem la cieu-
tat, per consel ad aver. Aras son vengutz totz los reis sa-
rarins en Jherusalem ajustatz an lo Saudan de Babilonia,
940 qu’el luro ac mandat, et a motz d'autres barons quel San-
dan ac mandat. E foron a parlament, trastotz aneron far al
Saudan sagrament. I. rey va far venir mot ben aparelhat
ad Arle en Proensa, a la nobla sieutat, que crestians avien
touta per forsa a Tibaut. Ij. cc.m\ sararins anb el van
945 menar ; al port d'Odor vengron aribar, pueis meron si per la
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40 Le roman d’arleS
Crau, ad Arle van anar. Quant foron davant Arle, si van
asetiar. Quant los crestians los viron, si van aparelhar.
De prop de la sieutat non auron estar. Ij. ans tenc la batalha
que non va refinar, tant quant crestians agron vitalha,
950 qu’el pogeson passar. Post non agron vitalha, s'aneron
perpensar qu'els si confeseson et aneson cumengar ;
e pueis diseron entra els: « Iscam lur, Dieus nos sie en ajuda
e nos venga ajudar.» Los crestians isiron foras, Dieus en fon
réclamât que aia lus armas e merse e pietat. Aras isi-
955 ron foras j. digous ben matin, am la gent pagana si van
[F 0 48 r°] mot ben ferir. Aqi viras far colps desobre los
sararins. Plus de .iiij.xx.m*. en remaron mortz aqui.
E los crestians moriron, non n’escapet mas .v., que fugi-
ron per lo boscage. En Fransa van fugir.
960 Morts son los # .xij. bars en Konsasvals; e Carie Maine
a Paris fon tornat. A calendas, lo sant jorn de nadal,
Yerian venc a Paris, an Garin lo Lieurant, e Ricart Camba,
e Gautier de Vais, e G. al Cornier, e Guirau l'Alaman,
que lurdones conjet qu'els pogesan anar ad Arle en Pro-
965 ensa los Sararins batalhar. Quant Carie o au ri, lur anet
demandar : « Aras digas, barons, voles la vos autres anar? »
— « Senher, oc, si vos plas. » — «Dieus vos don gazanhar;
prenes d'aur e d'argent, que puscas ben pagar las gens que
menares, que non s'en puescan blasmar. » Xxv.m a . homes ha
970 pe es a quaval van eysir de Paris, ves Arle van anar. Cant
foron de prop Arle, Verian lur va dir: « Ar ve(n)gan, bels
senhos, per on poiren tener. Nos non saben la tera que
poirian devenir; segan esta montanha, fasam aquest c&min. »
En la Crau son vengûtz, .j. carnin an trobat, entrol cas-
975 tel de Bigartjnon si son estanqatz. E cant las gens los viron,
trastotz s'en son anatz ; en la sieutat d'Arle per desot
terra si van salvar. Aqui s'asetieron, .vj. mes hi van estar,
que nuis oms sararins non l'aurava pasar. Trol castel
Agarin s'en van aras los franc. Quant o a vist Tibaut, s’en
980 va meravilhar, qu’el non crezia quels crestians non fosan
mais de gens .vj. aitants, que, si el saupes(on) que el fosan tant
pauc, pesa a lur fora isit azenan. Tibaut mandet al rey
Corbaran et a son fils Autaves [F 0 48 v°] que li venges aju-
dar, per ren non remares. Al rey Marsile mantenent o
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41
LH ROMAN D’ARLES
985 mandet. Tug van venir tantost, anc nengun non hi po-
nhet. En la Crau si van trastug trobar. Li sararins a Ti-
baut van mandar que venga(ga) am sa gent, que ren non
li cal duptar, qu'el non son ma y sol .xxv.m». « S’il eron
•ij. tans, Jion nos podon escapar. » Tibaut mandet als sa*
990 rarins qu’els vengesan avant e fasan .iij. partidas, per so que
nuis crestians non puescan escapar a la pagana gent. Ti-
baut si parti d'Arle an mot de sararins. En la Grau s'en
aneron. Yirian los a vist e dis a los crestians: « Sen-
hos, Dieus sie an nos, aras es luocs e saron que tug fasam que
995 pros. Vet vos mot de pagans que venon ferir an nos.
S'il son .lx.rn*., totz los podem aver, crezes, senhos. »
Varian si penset que tug fosson aqui am lur poder e plus de
sararins non degesan venir; e Gautier de Vais, e Garin,
Guilhenmes al Corni[e]r, e Gerart l'Alaman van dire a
1000 la gent:« Senhos, hanem avant; Dieus nos gart d’avol en-
contre de sesta mala gent. » Adoncas s'ajusteron sararins an
crestians. Mot ben fazien que pros las crestianas gens.
Si cant si batalhavon, per .iij. partz van venir .c.m\ sara-
rins, als crestians van ferir. La batalha fon gran, .j. pagan
1005 va venir, a son filh de Marsile gran colp lo va ferir d’una sa-
geta que tantost va morir. Aqui Golias près la batalha am
lo r ey Garin. Tant venc de sela gent pagana trastotz los
va ausir. Quant o vi Vezian, ves el s'en va venir.
Girarts l'Alaman, Guilhenmes al Cornier, Ricart lo Can-
1010 paines amb ei si van [F 0 49 r°] ferir. Mot gran fon la ba-
talha del .iiij. companios, ben feriron sus la pagana gent,
coma nobles barons. Aqui viras partir sararins e quavals ;
quels atendie de quolp, tôt anava a bas. Plus de .m. en
van ausire d’aquels fais sararins. Cant Tibaut o vi, va so-
1015 nar Malabrut e sonet Goliart e Longin,Danttug et Alimon,son
corin : « Aila a.iiij. maustins, anas los tost quere ; mais de
.iiij. m. ornes me an mort, fas los venir, qu'els me sem-
blan grans ornes a lur fag, m'es a vegeire. Mot feron miels
d’espara que nengun sararin. » Longin si va moure; Ali-
1020 mon, Goliart e Malbris als crestians van venir, am .v.m\ sa-
rarins. Quant foron al [s] crestians, Alimonlur vadir:
« Vterian, Tibaut vos manda querer e vostres companhons;
anas vos en an nos, o vos coven tug a morir. a Quant o
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*i LB ROMAN D'ARLES
auri Vezian, ad Alimon a dig : « Malvais can.non ti blànde ta
1025 ne nengun sararin(s) ; nos non sem mas .iiij ; aysi volem mo-
rir a la onor de Dieu, que nos aia merse. Non es nengun pa-
gan per que ulham fugir nos. » Quant o auri Goliart, ad
Alimon va dir : « Trop vivon aquest crestians, ane los om
ausir. » Los sararins si van moure, al [s] crestians van anar,
1030 tôt entorn los crestians van los environar. Los .iiij.
companhons farien ben lur afar, tro que los sararins los
van départir. Àr fon en la batalha Rainier e Girart (e Girart)
l'Alamant. Halimont e Longin lur foron al denant ; Girart feri
Longin, e Rainier Alimon. En tera va[n] quazer descavals
1036 ambedos. Si non lur venges ajuda, jamais non feran lur
pron. Los sararins aculliron [P° 49 v°] Girart e Rainier
Campaines. Mais de sararins foron que tug ferien sobre
eis. Vezian e Guilhermes ves Girart van tener. Girart tro-
beron mort e Rainier Canpaines. Guilermes va dire a Vi-
1040 zian: «Ves sel bosc nos non irem, que si hi siam, nos nos
i salvarian?» Aychi cant s’en anavan an.ij., Goliart e
Malbris lur va venir davant, an .v.c. sararins. I pagan va
venir a Guilhermes e cujet lo ferir. Guilhermes trais s’es-
para ez anet si cubrir ; gran colp det al pagan que tôt lo va
1045 partir. A Vezian s’en aneron Goliart e Malbris, an motz d'au-
tres pagans. Vezian an perpres, mot ben si defendia; ma
el non o poc tener. Goliart am .j. espieut davant lo va
ferir; la budeladadel cos foras li fes salhir. Guilhermes al
Cornier Goliart va ferir, quel bras am qu’el tenie l’espieut del
1050 cos lo li va partir. Goliart fes .j. crit, plus de .m. sararins
li va[n] tantost venir. Quant Guilhermes los vi, el bosc si
va gandir. Girart remas tôt sols, en tera aperet, e Guiler-
mes s’en fugi a Paris en Fransa.
Lo filh de Carie Maine fon fag rey e coronatz. Las novelas
1055 d’Arle lo Blanc li foron^tantost contadas per .G. al Cor-
nier, mortz eran los .iiij. xx. m\ que son paire li avie laisatz.
Cant lo rey,lofilh que fon de Carie Mayne o auri, sus los
sans de Dieu va jurar mais a Paris non intre tro qu’el sie ad
Arle estât. Lo rei tost mantenent fes cridar a Paris
1060 qui vol penre sos gages per ad Arle a-[F° 50 r ]-nar,^u’el
venga a Paris, qu’el los vol ben pagar. Motas gens ven-
gron a Paris ; lo rey los fes mot ben aparelhar ; el rey si
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LE ROMAN d’àRLES 43
mes permier, ad Àrle van anar an trabucs et an giens per
Arle trabucar. Mot de nobles barons menet lo rey am si
1063 e m °t d 0 &utras bonas gens. Ad Arle van venir; los sa-
rarins, cant viron los crestians, si van meravilhar que faran
d’aquel arney qu’el fazian aportar. Los crestians, cant
foron davant Arle, si van asetiar. Aparelheron lurs trabucs
per Arle trabucar. Lo rey Lois als sararins va mandar
1070 Q ue i 0 scan de la vila, vo el los en fara getar. Lo rey Lois fes
trabucar lo palais Carbonier, el palais Boriana que fon e
de Buenes, el palais Audeguier aneron espesar. Quant lo* sa-
rarins o vizon, fort si van espantar ; en las fosas de las are-
nas si van trastug intrar. Los crestians foron totz denfra la
1075 sieutat; el rey Lois a a totz comandatz que fondon totz
los mus e las fossas cremar, que mais nuis sararins non la
puescan estar. Adonc fonderon Arle que ren non hi remas, que
tôt non lo fondeson e non ânes a bas. En foras las arenas, plus
ren non la remas. Ar s’atendet lo rey lay von foron sal-
1080 v *tz. A las arenas, tôt entorn son anat, per regar[dar]
las fosas, si la pogran intrar. Tant son fortz las arenas que
non lur cal duptar, an que .agesan vitalha qu’el pogesan
manjar. Lo rey vi que non la podien intrar ; va dire al...:
« Senhos, que conseillas? que poiriam nos far? » —
1085 « Senher, dis Olevier, sabes vos con o faren ? [F 0 50 v°] Bo-
tem la fuoc grezesc e per aital nos las aurem.» En las arenas
fuoc grezesc van gitar ; tôt entor las arenas los mus viras
cremar; .iiij. meres estec lo fuoc que non lo pogron amor-
sar. Los sararins van tug raorir lain ; .j. non va escapar,
1090 naas aquels que sot tera s’en pogron fugir es anar. Lo rey
fes fondre totas las forsas de las erenas e las tors derocar e
cremar, pueis van anar a Gallici la vila despesar e fondre, que
mais nuis sararins non la puescan estar. Lo rey Lois s'en
tornet a Paris, que non li cal duptar que mais nuis sara-
1095 rins venga en Arle habitar. — Amen.
Qui escripsit escribat semper cum dno vivat.
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NOTES
i
Sur les diverses rédactions de la légende du bois de la Croix, qui
forme le sujet de cette première partie de notre compilation, voy. le
travail de M. Wilhelm Meyer, intitulé die Geschichte des Kreusholzes
vor Christus (Munich, 1881 )*. Notre poëme s'écarte en plusieurs en-
droits du texte latin qui parait en être la source principale, texte que
je désignerai par L (« Legenda ), et que M. W. Meyer a publié dans
■on chapitre VI *, avec une version provençale de ce même texte 8 .
L. 14.« musardamens. » Raynouard a l'adjectif musart, mais non
l'adverbe correspondant.
22. « sofriran. » Deuxième conditionnel, avec le sens du condition-
nel passé : « n'auraient pas seuls souffert. »
23. « abans », comme enans (44), signifie ici « au contraire », « loin
de là. »
23. « en »; 24. « an a van»; pour em, anavam . Les cas sont très-
nombreux dans notre texte de cette substitution abusive de n à m.
J'en avertis ici le lecteur une fois pour toutes.
30. « non » =* nos ne. Ou faut-il corriger nos f
35. « que perdon. » Corr. quens p . f
55. « Si. » Corr. Que f
82. « Que. » Corr. Qu'en?
85. Corr. Satan.
86. Le mot qui manque après mieu est probablement vet (défense).
88. « Ans. » Ms. Am.
89-90. Corr. en doptan: Satan f
107. « te azir. » Corr. te fas eissirt
109. L'auteur, qui jusqu’à présent s'était assez exactement con-
formé au récit de la Genèse , s'en écarte totalement à partir d'ici. Il
avait, au reste, déjà commencé à le faire dans les vers 87-8.
1 Extrait des Mémoires de l'Académie de Bavière.
* Antérieurement (1879), le même érudit avait publié un autre récit légen-
daire, mais d’une rédaction plus ancienne, concernant également nos premiers
parents, la Vita Adae et Evae, que j’aurai aussi à citer.
8 Presque en même temps M. Hermann Suchier, dans ses Denkmaeler der
provenzalischen Sprache und Literatur, p. 165, donnait une autre édition
du texte latin, accompagné de deux versions provençales, dont la seconde est
la même que celle de M. Meyer.
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4 «
LE ROMAN D* ARLES
112. Suppl, ne ou en après Que .
115. « post. » De même 950. Forme non relevée par Raynomrcl.
Elle est du reste assez surprenante, et je ne sais si Ton en trouverait
d’autres exemples que les deux qui sont ici. Peut-être est-ce une mau-
vaise lecture, avec méta thèse graphique, de pois.
116. « Dieus. » Sur cette forme de cas sujet, en fonction de régime,
qui revient plusieurs fois dans notre texte, voy. Sainte Marie Made-
leine dans la lilt. provençale, p. 66.
117. « que ». Pour qui. De même lignes 512, 790, 893, 1013, 1027.
119-133. A rapprocher de*ce passage de la Vita (W. Meyer, p. 44) :
« Tune Michael (variante) tulit Adam, Evam et puerum et duxit eos
ad Orientem, et misit Dominus Deus per Michael aagelum semina di-
versa et dédit Adæ et ostendit ei laborareet colere terram.»
120.« guiron » =guizon {guidon). Raynouard ne relève que la forme
guit , qui est celle du cas sujet, et qui correspond au français guide
(anc. gui, guion).
127. « la val de Bergon. » C’est Hébron que notre auteur veut dire,
au moins je le suppose, car les autres rédactions de la légende font
retirer Adam et Eve dans cette vallée. Du reste, Hébron peut facile-
ment devenir Guebron, d’où par métathèse Bregon, Bergon.
133-153. Cf. L t § 3 et 4 . Là il n’est pas question de fleurs dont le
parfum risque d’endormir Seth, et M. W. Meyer ne signale rien de
pareil dans les autres rédactions qu'il analyse. Cf. plus bas, vv. 170-
174.
133. Corr. Demandar , en supprimant la virgule qui précède?
138. « s’ay. »» Pour sa (sai) ay. On trouvera plus loin, 150, etc., des
cas assez nombreux de l’élision de l’a de l’adverbe la (= lai).
153-182. Le récit du voyage de Seth est ici beaucoup plus développé
que dans L; au contraire, notre poëme passe complètement sous si-
lence la plus grande partie de ce qui suit dans L (§ 5 à 10), c’est-à-
dire le récit des merveilles qu’il fut permis à Seth de voir dans le Pa-
radis.
156. « Que. » Ms. E .
157. « et aqui. » Corr. que aquif
164. « qu'en fon meravillos. » Il faut entendre, du moins je le pense,
« (tel) qu’il en fut émerveillé. »
177. = som li venia.
178. « s’il. » On rencontrera encore plus d'une fois cette forme in-
correcte, il, pour el.
179. « révélant. » Pour revelhant.
187. « pasava. » Corr. pasavan (las pesadas)f
188. « for. »= fort ou fors P
193. « va venir » = venc. De même van isir (215) * isiron . Je
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47
LE ROMAN D* ARLES
relève ici une fois pour toutes cet emploi de l'indicatif présent de
anar, dont les exemples sont sans nombre dans notre texte et ne
manquent pas dans beaucoup d'autres 1 , mais qui n'est plus usuel
aujourd'hui qu'en catalan, pour remplacer le prétérit du verbe à l’in-
finitif duquel on le joint. Plus loin, 3* partie (670, etc.), anet joue
aussi le môme rôle, mais bien plus rarement.
201. « Set. » Ms. sec .
216. A partir d’ici, notre texte s'écarte complètement de L , pour
qui les trois arbres, ou plutôt les trois ar.bustes, étaient de même hau-
teur et ne diminuèrent ni ne s'accrurent jusqu’au temps de Moïse, qui
les transplanta au pied du mont Thabor (ou du mont Oreb), d’où
David, mille ans plus tard, les transporta à Jérusalem.
218. « esdelubre », déluge. Raynouard n'a pas cette forme; mais
on trouve ailleurs delubre , avec quoi notre esdelubre est dans le
même rapport que esdelubi ( = Rayn. esdoluvi) avec delubi . Pour
ces dernières formes, comme pour delubre , voy. Azaïs et Mistral.
219-233. N'y aurait-il pas là, mêlé à d'autres éléments, sur l’origine
desquels je ne puis émettre même une conjecture, un souvenir extrê-
mement confus de ce qu’on raconte d’un prétendu fils de Noé, que di-
vers récits introduisent dans notre légende? Le Pseudo-Methodius et
Godefroy de Viterbe lui donnent le nom de Jonitus, et le premier de
ces auteurs nous apprend qu'il fit bâtir, non loin de la mer*, dans un
pays appelé Eliochora ( id est Regio solis), une ville dont le nom fut
emprunté au sien. Ce nom, Jonitus , qu’on a pu lire Jo'nicus , est de-
venu ailleurs Genico et même Jerico s . Cette dernière forme autorise
à en supposer une autre telle que Jorico . Or à ce nom d’homme cor-
respondrait naturellement, comme nom de ville, Jorica , d'ou se dédui-
rait sans peine Joria (cf. amia, etc.) et par suite le Jozia de notre
texte. On pourrait aussi être tenté de voir, dans VEscorie du v. 224,
une altération de YEliochora du Pseudo-Methodius, dont on aurait
fait du nom d’une contrée celui d'un homme ou d’une ville. Voici, du
reste, pour permettre au lecteur de se rendre compte de ce qu'il peut
y avoir de fondé dans mon hypothèse, les textes qui me l’ont suggérée :
[Pseudo-] Methodii P a tare nsi s episcopi Revelationes ( Bibl . maxima
Patrum, III, 728):
1 Cf. Revue des /. rom., VI II, 44. Aux textes cités en cet endroit, on peut
ajouter la Chronique biterroise de Mascaro,Pâ<7omena,où cet emploi de anar
va, comme dans le Roman d'Arles, jusqu’à l’abus, le Breviari d'amor, Jau -
fte, Guilhem de la Barra , les Joyas del Gay Saber (pp. 114, 126) ; etc. Les
Leys d'amors qualifient de pedas , c’est-à-dire de chevilles, les formes d’anar
ainsi employées.
2 Cf. noire ligne 219 : Sieutatz e vilas si bastiron per lo mar.
* Voy. W. Meyer, pp. 61, 62, 63.
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48
LH ROMAN d’àRLRS
« Centeaimo autem nono de tertia chiliade , natus est filius qu&rtus
Noë, secundum illius similitudinem, et vocavit nomen ejus Ionithum.
Trecentesimovero an no de tempore trium millium annorum, dédit NoS
donationea filio auo Ionitho et dimisit eum in terram Etham. Et post
obitum Noë, sexcentesimo et nonagesimo an no, in eisdem trium mil-
lium annorum ascenderunt filii Noë de terra orientali Etham, et ædi-
ficaverunt sibi turrim in terra seu campo Sennaar ; et ibi facta est di-
Visio linguarum, et ex hoc dispersi sunt homines super faciem terræ
totius. Ionithus autem, filius Noe, tenait introitum in Etham usque
ad mare, quod vocatur Eliochora, id est Regio solis, in quo solis or-
tus fit, et habitavit ibidem. Hic Ionithus accepit a Deo donum sapien-
tiæ ad omnes artes, qui non solum iitterarum et aliquarum artium,
verum etiam omnis astronomiæ primus fuit inventor. Ad hune des-
cendens Nemroth, qui erat vir gygas, & in multis eruditus a Deo, ac-
cepit a Ionitho consilium, in quibus infiuentiis astrorum incipiendum
esset ei regnare super terram. . . [Babylone est bâtie et Nemrod y rè-
gne]. ... Et post hæc fecerunt filii Cham regem ex ipsis, cui [nomen
Pontipius.Et septuagesimo et nonagesimo temporis trium millium an-
norum, anno tertio regni Nemroth, miserunt viros potentes filiis Ja-
phet, nimis sapientes et artifices in arte tectoria cons truc tores, et des-
cenderunt in terram Etham ad Ionithum, filium Noe, et ædificaverunt
ei civitatem, juxta nominis illius nuncupationem. Et pax multa erat
in terra Ionithi et Nemroth, usque in presentem diem. Regnum autem
Nemroth et filii Sem et Pontipii filii Cham et Japhet contra se invicem
rebellabant. Scripsit autem Ionithus epistolam ad Nemroth ita di-
cens : quia regnum filiorum Japhet ipsum incipit delere regnum Cham.
Hæc autem régna primum apparuerunt in terra et post hæc didice-
runt omnes gentes constituere sibi regnum post regnum Nemroth, ex-
pleta tertia chiliade annorum. »
Godefroi de Viterbe, Panthéon (ms. 222 de la bibliothèque de TÉcole
de médecine de Montpellier, f° 173 v°) 1 :
« Narrat Athanasius quoniam Noe patriarcha
Filiolos genuit binos egressus ab archa,
Ex quibus Jonitus tune erat astrologus.
Hic pâtre narrante didicit quæ sit paradisi
Gloria, quam fuerant protoplasti perdere visi.
Hanc petit a domino monstret ut ipse sibi;
Raptus et a domino tandem fuit in paradiso,
Qua varios fructus discernens undique visu
* Cf. W. Meyer, chap. II, p. 12.
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LIS ROUAN d’aRLES 49
Plantas arboreas très tulit inde datas.
Arbor in his abies et palma fit atque cypressus,
Quas pater Jonitus féliciter inde regressus
Plantât diversis disparibusque locis.
Contrahit lias natura simul, pariter coalescunt,
Diversis foliis uno sub cortice crescunt
Absque labore viri sol a fit arbor ibi. »
Compendi historial de la Biblia (Genesi de scriptura) *, texte ca-
talan du XV e siècle, publié par M. Miquel Victorié Amer, dans la
Biblioteca catalana de M. Aguilô, pp. 18-19:
«Depuys que Noe exi de la archa e hachcomplits .de. anys, adonchs
engendra un fill qui hach nom Genico : e aquell fo gran strolech e
Loy parlar de Adam, e dix un dia que volie anar veure aquell loch
hon jahya nostre pare Adam soterrat, e ana s’en en la vall de Ebron.
E quant fo prop de aquell loch on Adam fo soterrat, viu aquells .iij.
rams, que hoys dir demunt, qui estaven en la bocha de Adam, e dix
prophetant: « Jo levare aquests .iij . rams e posai* los he an lo desert,
efaran de aquests creu al meu senyor Deu. E trasch los de la bocha
de Adam e posalos en lo desert, e posa la un luny del altre. E per
virtut de Deu e per aquella cosa qu’eu havia esdevenir, ajusta los
natura tots .iij. en .j. loch et feu de tots un arbre: e no havia en l’arbre
negun departimeut, sal de les fulles qui eren de cipres e de cedre e
de palma: e estech aquel arbre aqui entro al temps de Moyses. 2 »
210-220. Passage probablement corrompu. Je ne ponctue pas, de peur
de le faire à contre sens. 11 semble bien que en lo luoc doit être un
un complément circonstanciel, comme disent les grammairiens, de
feron ; mais ce qui précède n’est pas clair. Peut-être il y a-t-il une
lacune. On ^pourrait songer, moyennant une légère correction, à quel-
que chose'comme « pos lo mai* an sauput que s'era retirât .» Ou vaut-
il mieux entendre per lo mar au sens de « au bord de la mer »?Cf. la
note 2 delà p. 47 ci-dessus.
222. «jaques », pour jagues. Cf. plus loin, 619, venqua pour venga.
1 Sur cet ouvrage et les versions et mss. qu’on en possède, voy. les Denk-
maeler de M. Suchier, p. 405 ; sur ses sources, le mémoire de M. Rohde in-
séré dans le même -recueil, sous le titre de die Quellen der romanischen
Weltchronik .
* Même récit, d*après M. W. Meyer (p. 61), dans un ouvrage italien intitulé
Fioretti délia Bibia hystoriati, dont je n’ai pu voir ni ms. ni édition, mais
qui n’est, paraît-il, qu’une autre version du Compendi histonal de la Biblia.
Voy. les Denkmaeler de M . Suchier, pp. 497, 573.
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bO IM ROMAN D’ARLES
225. « Jesu. » Le ms. ne donne jamais ce mot qu'en abrégé ( jhu
et la barr^ordinaire) ; j’écris en conséquence Jesu partout.
228. « escola », synagogue, et généralement temple. Acception que
Raynouard n’indique pas. Cf. Du Cange, VI, 111, col. 1, sous escole.
Voir aussi le % Dict. de Mistral.
233. « va o tener longtemps. » J’entends : il continua longtemps
d’agir ainsi.
234-270. Le « chevalier », en qui tout à l’heure j’ai cru pouvoir re-
connaître le Jonitus de Godefroy de Viterbe, s’offre à nous maintenant
comme une transformation non moins profonde d’un autre personnage,
à savoir la Maximilla de la Légende (W. Meyer, VI, 24-26.)
237. Ms. nos zen.
253. li paraît se rapporter à aquels plutôt qu'à Dieus. Ce serait,
dans ce cas, un exemple intéressant à joindre à ceux que j’ai déjà
relevés ailleurs, de l’emploi, rare dans les anciens textes, mais aujour-
d’hui commun, de li pour lor.
272-282. Nouvelle altération de la Légende, qui attribue à la reine
de Saba ce que notre auteur raconte ici de la fille d’un «homme de Jé-
rusalem ». Cf. \V. Meyer, VI, 27.
290. « per espoliar. » Suppl. V après pert
297. « pre(e)nga. » re est en abrégé dans le ms.
302. Je suppose que ceci est le commencement d’un discours tenu
à Pilate et dont le copiste aura omis de transcrire la suite. Immédia-
tement au-dessous on remarque dans le ms. une longue barre à l’en-
cre noire, dont l’extrémité de droite traverse trois o. Ce doit être un
signe renvoyant à un feuillet où ce qui manque ici fut transcrit par
un copiste postérieur. Mais ce feuillet a disparu.
Il
Sur les sources et les rédactions diverses de la légende de la Ven-
geance du Christ, à laquelle nous arrivons maintenant, on lira avec
intérêt le chapitre XI (et ses appendices) du savant ouvrage de
M. Arthur Graf, intitulé Roma nella memoria e nelle immaginazioni
del Medio Eto. Voir aussi Bulletin de la Société des anciens textes ,
I, 52 (article de M. Paul Meyer). Dans les récits latins, Tibère est
atteint de la lèpre et, en même temps (dans quelques-uns du moins),
Vespasien (ou Titus) a la face rongée par un ulcère ou par des vers.
La modification de la légende que l’on remarque dans notre poëme
(où, César étant sain, Vespasien, seul malade, est donné comme son
fils) n'a pas été, à ma connaissance, signalée ailleurs. J'en dis autant
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Le RO il an d’ A RL ES 51
du nom d’Articlam, que ce dernier aurait porté d’abord, et de sa rélé-
gation à Fréjus dans une tour.
303. « Serar. » 11 s’agit de Tibère.
310. « Fréjus. » Ms. freuis . Cf. 430.
313. « vespas. » Proprement guêpes ; cf. ci-après, sur 465, et dans
DC, cet extrait d’un glossaire latin-français : « Vespa, une mousche
qui naist de charoigne d’asnes. » — « feres. » Corr. fereson ?
314-349. Sauf l’omission en cet endroit du personnage de Véroni-
que, qui ne sera introduit que plus tard (476), notre récit suit ici assez
fidèlement celui de la Mors Pilati (Tischendorf, p. 456).
320. « sans. » Sur cette forme de cas sujet en fonction de régime,
Cf. Sainte Marie Madeleine dans la littérature provençale , p. 66,
n. 1 (Revue, XXVI, 114, n. 1).
331. « reginat. »Corr. reignatî
338. « chochatz. » Sic , pour cochatz.
348. « sota. » Manque à Raynouard. Ce doit être l’adverbe sota
« substantivé. » Le fr. soute , qui en est la traduction, doit en prove-
nir.
350-425. Tout ce passage dérive de la Mors Pilati , mais avec de
profondes modifications. 11 y a là, dans le texte latin, une véritable
scène de tragi-comédie qui a disparu du nôtre. Celui-ci en revanche
en contient une autre, non moins curieuse, qui manque dans le latin
comme dans toutes les autres rédactions à moi connues. Voici, pour
que le lecteur puisse comparer, le texte de la Mors Pilati (Tischen-
dorf, p. 457») :
« Pontius igitur Pilatus imperio Caesaris capituret Romam perdu-
citur. Audiens Caesar Pilatum Romam advenisse, nimio contra eum
furore repletus est et eum ad se adduci fecit. Pilatus autem tunicam
Jesu inconsutilem secum detulit: quam indutam coram imperatore
porta vit. Mox ut imperator eum vidit, omnem iram deposuit et ei
p rotin u s assurexit 2 , nec dure sibi in aliquo loqui praevaluit : et in ejus
absentia qui videbatur tam terribilis et férus, nunc in ejus praesentia
invenitur quodammodo mansuetus.Cumque eum licentiasset, mox con-
tra eum terribiliter exardescit, se miserum cl ami Uns quia ei furorem
sui pectoris minime ostendisset. Statimque eum revocari fecit jurans
et contestans quia filiius mortis estetnefas est eum vivere super ter-
ram. Qui cum eum vidit, continuo eum salutavitet omnem animi fero-
citatem abjecit. Mirabantur omnes, mirabatur etipse, quia sic contra
Pilatum dum abesset exardesceret, et dum praesens esset, nil ei loqui
1 Cf. Legenda aurea , cap. LUI, p. 233 de l’édition Gr&esse.
* Notre texte dit bien aussi 388 : per el si va levar /mais il n'ajoute pas que
ce fût malgré lui.
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58 LE ROMAN d’aRLE8
posset aspere. Tandem divino nùtn vel forte alicujus christiani suasu
ipsum ilia tunica expoliari fecrt, et contra eum pristinam ferocitatem
animi mox resumsit. Cumque de hoc imperatorplurimum admiraretur,
dictum est sibi quod ilia tunica fuisset domini Jesu. Tune imperator
eum in carcerem recipi jussit, donec sapientum consilio deliberaret
quid de eo fieri oporteret. Post autem paucos dies, data est igitur in
Pilatum sententia ut morte turpissima damnaretur. Audiens hoc Pi-
latus cultello proprio se necavit, et tali morte vitam finivit. »
370. « fas. » Ms. fag . Le g ici paraît sûr; mais il y a des endroits
où cette lettre et T# sont difficiles à distinguer, ce qui a lieu égale-
ment dans d'autres mss. du même temps.
382. « portet »Ms. pontet . — 396. « lo.» Ms. la. — 407. « le cor.»
Sic.
409. « caüs. »On peut lire aussi bien cans. Mais, outre qu'un chien
n'est pas nécessairement noir, la rime paraît exiger us (Jésus). Caüs ,
mot qui manque chez Raynouard, mais qui vit encore, signifie hibou ,
chouette.
410. « sargans », pour sarjans; forme qui sans doute vient du fran-
çais. Cette partie du roman d'Arles dériverait-elle aussi, comme cela
paraît sûr de la troisième, d'une source française?
417. « fas. x Ms .fag. Cf. la note sur 370. La seconde pers. du
pluriel, dans notre texte, est partout en 5 , non en tz , ce qui exclut
l'hypothèse, autrement admissible, à la rigueur, d'une mutation, pure-
ment graphique, de ts'e n g (=ch),ch,ea Provence, sonnant comme tz.
419. « gens. » Ms. getig.
421. « far. »Corrr for (= fort) ?
430. « 8'i. >» Ou si f
435. « si » = ici ; manque à Raynouard.
436. « fas mi far. » Lacune après far ? On voudrait un mot signi-
fiant échelle , ou quelque chose d’approchant.
438. « o fas »Corr. fes , en mettant les guillemets après Dieu?
440. Dans les autres versions jusqu'ici connues ou signalées, c’est
toujours la « Véronique », c’est-à-dire l'image du Sauveur, empreinte
sur le linge qui avait essuyé sa face, et non, comme ici, la tunique du
Christ, dont la vue guérit soit Vespasien, soit Tibère. — « le vestir. »
Autre exemple (cf. 407) de l'article le en fonction de régime.
441. « de. » Ms. ui.
443. « anar. » Ms. anan.
452. « trancar. » Pour trencar. On pourrait lire aussi bien traucar,
qui, semble-t-il, conviendrait moins. Même observation pour trancada
de la ligne 454.
461. « Plasa. » Ms. Qlasa. Le Q termine une ligne.
463. « que. » Corr. quem ? Un tilde a pu facilement être oublié.
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Le roman d'arleS &
465. « que Vesperiam l’apelet. » A cause des vespes dont il venait
d’être délivré. C’est ce que l’auteur aurait dû ajouter. Dans une version
française, en prose, de notre légende, qu'Edélestand du Méril a publiée
dans ses Poésies populaires latines du moyen âge, on lit, p. 363: « Et
icil Vespasiiens avoit d’enfanche une maniéré de vers es narines c’on
apieloit xoespes, et de ces wespes estoit-il apielés voespasianus . »
M. Graf (I, 396, note 77), outre ce passage, cite encore celui-ci d’un
commentateur de Dante, Jacopo délia Lana : « Fu un imperatore ro-
mano lo quale ebbe nome Vespasiano, imperquello che le vespe li fa-
ce vano nel naso nido. »
467. « faren» = fâsen(faciant). Ms. farem .
468. « dig. » Ms. dis . C’est l’inverse de la faute (g pour s) déjà re-
levée, et dont nous trouverons plus loin d’autres exemples.
470. Ce retour de la maladie dont Vespasien avait été guéri par la
vertu de la tunique du Christ paraît propre à notre texte. Je soupçonne
ici une confusion avec la légende de Constantin, que Dieu frappa de
la lèpre, en punition du retard qu’il mettait à lui témoigner sa recon-
naissance de la victoire obtenue par la vertu du signe de la croix. Cf.
Graf, Roma , II, 80.
472-501. Nous avons ici un résumé extrêmement succinct, mais
assez fidèle, de la forme de notre légende qui, d'après M. Paul Meyer,
aurait été la plus répandue au moyen âge, et de laquelle on possède une
rédaction provençale très-développée, que nous publierons prochaine-
ment Voy. Bulletin de la Société des anciens textes , I, 52, et cf.
Graf, Roma, I, 404.
472. Le personnage appelé ici « don Joan » est nommé Gai dans la
rédaction provençale précitée et dans celles qui lui sont apparentées.
474. « Vezona » = Verona ; forme qui n’est point particulière à no-
tre texte. D’autres que notre auteur nomment ainsi cette femme, plus
ordinairement appelée Véronique. Cf. Saint Fanuel t v. 3263. — « la
benda de Nostra Dona. » Je ne sais si un autre texte que le nôtre donne
cette origine au linge miraculeux. Ailleurs c’est la bande de Véroni-
que elle-même. La benda était une pièce du vêtement des dames, qui
couvrait, partiellement du moins, la face, et n'était pas flottant comme
un voile. Voy. le glossaire de Flamenca .
475. « verorica », pour veronica. Cf. moriment * moniment, dans
la Vie de sainte Madeleine et ailleurs.
477. u va(n). » Ms. và. La copie d’où la nôtre dérive portait peut-
être vay, et l’y y aura été pris pour une n; confusion facile dans quel-
ques mss.
478. « e sanatz. » Ms. asanats.
480. « escalh » = fr. écaille. Manque à Raynouard.
482. N’y a-t-il pas une lacune après tôt dregt
4
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64
La roman d’arles
485. « destres », sous entendu delmur. Le destre était une mesure
linéaire, à l’usage des arpenteurs. Le verbe correspondant est destrar.
Bertran Boisset, le copiste de notre ms., était, rappelons-le en pas-
sant, arpenteur de son état, ce qui était une fonction importante et
considérée, et nous possédons un traité provençal d’arpentage transcrit
tout entier de sa main, où le destre est représenté plusieurs fois dans
de très-curieuses figures 1 .
487. « dou », du côté de. Forme que Raynouard n’a pas relevée,
bien qu’il y en ait d’autres exemples. C’est daus, sauf affaiblissement
de la diphthongue. Cf. sôuva= sauva, et autres formes pareilles, dans
lesquelles la diphthongue au, devenue atone (c’est le cas de daus,
comme proclitique), s’est nécessairement affaiblie.
488. « pant » = pan (de mur). Cf. ant = annum. Sur ces formes
en t, déduit d’un z, voy. la Revue, Y, 333.
490. « fugon. » Corr. fugiron ?
491 . « afugar » = afogar, brûler.
494. Suppl, que devant anc f
499. « si »=sie (sia) . Cf. si cornes = sia cornes dans une tenson
du XIV e siècle, composée dans le même pays et peut-être dans la
même ville où notre ms. fut transcrit ( Derniers Troubadours de la
Provence, p. 130, v. 55, où l’éditeur a eu le tort d’imprimer 5 V, comme
je l’ai déjà fait remarquer*).
500. « los fara. » Sic. Suppl, morir? Mettre un point Après jurieus?
507. « desvedat », pour devedat .
512. «Que », pour Qui. Cf. ci-dessus, la note sur 117.
513. « Ion », pour los ne, comme non pour nos ne. Le ms. porte
lôs ; mais Fs est empâtée, et il semble qu’on ait voulu l’effacer.
516. A partir d'ici, à la légende de Tibère viennent se mêlerdes sou-
venirs confus de l'histoire de Constantin (cf. 534); mais c’est bien
toujours, dans la pensée de l’auteur, au même personnage que nous
avons affaire, comme le prouvent les lignes 589-590. 11 convient aussi
de rapprocher de ce passage de notre poëme une autre variante de la
légende de Tibère, que l’on trouve dans le Compendi historial de
la Biblia, déjà cité plus haut (p. 513). On y lit, p. 276, qu’après s’être
converti au christianisme et avoir puni Pilate, « l’emperador [Tiberius
César] ab Velocia 3 mes se en la mar e ana s’en en Septimanea per
1 Bibl. de Carpentras, ms. n® 323. Sur le desire de la ville d’Arles, qui
avait seize pans de long et qui servait à « destrar totas posesions, eseplat
viohas », on trouvera des détails intéressants dans les mémoires du même
Bertran Boisset ( Musée d'Arles, 1876-1877, pp. 84 et 94).
* Revue, XXI, 101.
8 Le Velosianus (Volusianus), de la Vindicta Salvatoris et de la Mors Pi*
loti, le cavalier gentil de notre texte (305, 361, etc.).
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LÉ ROMAN d'aRLBS SS
un riu qui a nom Vira 1 , e aqui mes se en una cova. Et estech aqui ab
dejunis e ab oracions servint Deu. E ans que un any se complis envia
nostro Senyor per ell e mori. E ana s’en la sua anima en gloria. »
528. « Elegos. » Cf. plus bas (541 ) Elengos. Si de ces deux formes la
première est la bonne, on pourrait y voir les Ligures.
Ibid . « Barbis. » Peut-être les Bébryces.
530. « deforar ei&ir.» Sic. C’est un cas particulier du changement, si
fréquent dans notre ms., de T* douce ou du z en r, entre deux voyelles.
Cf., deux lignes plus bas, ar Arle=* az Arle.
539. « anonciat. » Sic. Ce n’est pourtant pas ce que le contexte
semble réclamer. On voudrait quelque chose comme acabat . Peut-être
faut-il corriger anomnat.
540. « a non. » Corr. acf — « Gerengost. » Ce nom ne serait-il pas
une altération de Segoregios, qu’on trouve comme variante de Sego-
brigiosî Cf. Saxi, Pontificium Arelatense, p. 6.
542. « avie. » L’un des jambages du v (u) manque dans le ms. ; mais
l’i est marqué.
543-575. « Quant l’enperador. . . menasant. »Ce passage, dont j’au-
rais dû faire un alinéa distinct, est à rapprocher du poëme, encore en
grande partie inédit, où sont racontés la vie et les miracles de saint
Trophime, particulièrement des vers 320 à 422. Là le personnage qui
donne son palais pour en faire une église a sa résidence ordinaire à
Lyon (cf. notre texte, 587) et est qualifié seulement de roi ou de
prince (le reis que regia trastota aquesta terra , le bons prinses que
regia las gens).
544. « li », pourt. Cf. 1. 618. Ces exemples prouvent que la con-
fusion qu’on remarque aujourd’hui, en Provence et ailleurs, des repré-
sentants de illi et de ibi, remonte au moins au XIV e siècle. Raynouard
ne mentionne li que comme pronom.
546. Suppl, si fereson devant balejar't
558. « le ques », pour li ques. La forme le, pour le datif, est con-
nue ; mais la Provence n’est pas de son domaine. Aussi parait-elle
ici un peu surprenante.
560. Remarquer ici bons homs, et de même 1. 575, en fonction de
régime. Influence probable du vocatif. Cf. Sainte Marie Madeleine ,
p. 66 (Revue, XXVI, 114).
566. « avem. » Ms. avez ; mais là * =» m, comme dans beaucoup
de mss. du même temps, et comme dans beaucoup d’incunables.
i Sans doute la rivière de Berre, sur les bords de laquelle Charles Martel
vainquit les Sarrasins en 737. Ne serait-ce pas le môme nom, pour le dire en
passant, transporté de la rivière à la contrée qu’elle arrose, qu'il faudrait re-
connaître dans la a terre de Bire » de la Chanson de Roland (v. 3995)7
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te Le rouan d’arles
567. Cette ligne doit se rejoindre à 565, par-dessus 566, qui est évi-
demment une parenthèse, assez obscure d’ailleurs.
575. « mas. » C’est et qu’on voudrait ici; mais pourrait avoir ce
sens 1 ; mais mas, si je ne me trompe, ne l’a jamais eu. Peut-être,
comme, en Provence, mais avait à la fois le sens de magis et celui de
sed, le copiste a-t-il pu croire que mas avait aussi cette double signifi-
cation.
576-532. Nous avons là sans doute quelque souvenir de légendes
locales, qui se rattachaient à des monuments de la ville d’Arles ou
de son territoire. La Truelha (la Trouille), dont les ruines se voient
encore, était un palais bâti par Constantin 2 ; le nom de Carbonier
est emprunté, comme le remarque M. Lieutaud (lou Rouman d'Arles,
p. 14), à un antique édifice, qu'on appelait le château de la Carbo-
nière*. Le même érudit remarque aussi que Bigard est le nom d’un
quartier de la Crau, et que Boriana, Augin et Agarin rappellent res-
pectivement le quartier du village voisin de Noves appelé Bouriant \
la vallée d 'Auge qui s'étend de Baux à Fontvielle, et le quartier ou
la montagne d'Agard dans le territoire de Fon vielle. Cf. d’ailleurs 11.
755, 758, 761, 765, 975, 1071, 1072.
576. «Aras. »Nom imaginaire, tiré de arenasf Nostredame appelle
ce roi Archin, et le distingue du fils de Magin (chez lui Mon tarin).
577. « Magin. » N’est-ce pas au nom de ce personnage, sur lequel
je regrette de ne rien savoir de plus, qu’il faut rapporter l’adjectif
français maginois, qui sert si souvent d’épithète à palais ou à d’autres
substantifs désignant des constructions grandioses, ou, en général,
des ouvrages artistement faits? Cf., en latin comme en grec, Dédale,
et les adjectifs qui dérivent du nom de cet habile architecte.
577. « que li sovenc de gentileza. » Ceci n’est pas très-clair. Nos-
tredame a pris, semble t-il, gentileza au sens du fr. gentilité, pays
des gentils, et lisant sans doute venc, au lieu de sovenc, a rendu ainsi
ce passage : « qu’era vengut de Gentilia embegrantgent qu’el menet.»
578. « ac. » Corr. e ?
580. « Augin. » Ms. Augï ; Nostredame Auguy. — « Agarin ».Nos-
tredame Agassin. — « Bones » . C’est bien une n / mais plus loin (1072),
on peut lire Bueves aussi bien que Buenes.
1 Cf. ma Grammaire limousine, p. 338.
2 Voy. Seguin, A ntiquités d* Arles, p. 56.
2 Sur ce qui en reste, voy. H. Clair, les Monuments d'Arles, p. 144. Cf.
ci-après, I. 1071.
* Cette hypothèse est infirmée par la 1. 1071, où l'on voit que le palais
Boriana était dans Arles même, ainsi que le palais Audeguier (= Audegier,
581) et le palais de Buenes (= Bones, 580).
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US ROMAN O* ARLES 67
581. « Ermin.» Ms. erium (l’t est marqué); Nostredame Hermin.
581. Le roi de « la Truelha » devient chez Nostredame, qui devait
pourtant bien connaître la Trouille, « lou rey de Troia la Grand. »
582. « el rey Galic. » Faut-il rapprocher de ce nom celui de « Gallici
la vila », qu’on trouvera plus loin (1092)? Ce serait alors dans la con-
trée d’Arles qu’auraient été situés le royaume de ce prétendu roi et
cette prétendue ville, comme l’étaient le château Bigart et le château
Agarin.
595. Vaudrait-il mieux mettre la virgule après tornar, et le point-
et- virgule après plazer ?
587. « Livon.» On peut lire aussi bien Linon ; mais je pense que
c’est Livon qu’il faut préférer. J’y vois Lyon , avec insertion d’un t?.
588. « d’Aianon. »Corr. da Lavon ? Peut-être Va de la préposition
devrait-il être incorporé au nom. Cela expliquerait la forme az de la
1. 587 ; il faudrait alors y corriger az Alivon et écrire ici d' A lavon.
Le passage d’t à a reste inexpliqué. 11 est d’ailleurs manifeste que le
copiste ne comprenait pas de quelle ville il s’agissait.
589-90. «Vesperian dig Arteclan. » C’est l’i^yerse qu’il fallait dire.
Cf. 465, 468.
591. Suppl, o après quant ?
592. « sieutat. » Ms. sieutet,
593. « tant. » Ms. tanc.
111
L’intérêt de cette troisième partie de notre compilation 1 réside sur-
tout dans ce qu’elle nous a conservé et dans ce qu’elle nous permet
de conjecturer d’une chanson de geste, sans doute française, qui est
perdue, mais sur laquelle nous possédions des indications, dont la plus
ancienne et la plus explicite remonte au XII e siècle. C’est celle que
1 Sur les sourçes historiques de celte troisième partie du Roman d'Arles,
— car elle repose certainement sur un fondement réel, à la condition de rap-
porter à Charles Martel ce qui y est raconté de Charlemagne el de Louis le
Pieux, — le lecteur peut consulter, outre les histoires générales de Langue-
doc et de Provence, Anibert, Dissei'tation sur la montagne de Cordes •,
pp. 51 et suivantes; Reinaud, Invasions des Sarrazins en France, pp. 38, 54,
57, 62 ; Jonkbloel, Guillaume d’Orange, 11, 45; Paul Meyer, Tersin ( Roma -
nia, I, 58-59).
* Anibert anppoee que oe nom fat donné & la montagne en question par les Sarra-
sins, qui occupaient Arles et son territoire, en souvenir de Cordone ( Cvrde» dans nos
poèmes français).
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M
LE ROUAN D’ARLES
fournit la Kaiserchronile, ou Chronique des empereurs , poëme alle-
mand dont deux mille vers environ résument des récits poétiques con-
sacrés à Charlemagne. Voici la traduction du passage qui concerne la
prise d’Arles ; je l’emprunte en majeure partie à M. Gaston Paris 1 .
« L’empereur Charles assiégea une place forte qui s’appelle Arles. Il
y resta plus de sept ans. Les assiégés le méprisaient: un canal sou-
terrain leur apportait en abondance du vin et tout ce qui était néces-
saire à leur vie ; mais Charles, par grande adresse, détourna le canal,
si bien qu’ils ne purent plus tenir. Ils ouvrirent les portes et combat-
tirent avec un grand acharnement ; mais ils succombèrent dans la ba-
taille*. Il y avait tant de morts des deux côtés que nul n’en eût pu
dire le nombre. On ne pouvait distinguer les chrétiens des païens, quand
Dieu les indiqua à l’empereur : il trouva tous les chrétiens placés dans
des cercueils de pierre bien ornés. C’est une chose qui mérite d’être
racontée à jamais s . »
D’autres allusions plus récentes à un poëme dont la prise d’Arles
faisait le sujefsont les suivantes, qu’on trouve dans la Vie de saint
Honorât et dans la Pftssion de saint Porcaire , de Raimond Feraud :
Cant Karlle maynes fon tomatz
De Roma, nostra pozestatz
As Arlles venc premierament,
Assajet la ciptat forment,
Et aqui mori 4 Vezians,
Car le trachers, malvayts payans,
Princes de la Trapa, a llayron
L’auciys et a gran tracion*.
Pueys que Karlles ac la ciptat,
1 Voy. Histoire poétique de Charlemagne , p. 258. Cf. 'Paul Meyer, Ter-
sin, tradition artésienne (Romania, I, 56).
* Cf. notre texte, 769, 781-786, 808-817,839-41, 976-977.
* Cet intéressant épisode manque dans notre texte ; mais il se trouve tout
au long, ce que ni M. Paris, ni M. Meyer n*ont remarqué, dans un autre poëme,
depuis longtemps connu, dont l’auteur a dû puiser, plus d'une fois, aux mê-
mes sources que celui du Roman d'Arles, je veux dire la Vie de saint Tro -
phime, et il s’y place entre deux récits empruntés au Pseudo-Turpin, dans
lesquels sont confondus, comme ici du reste en quelques endroits, les événe-
ments de la guerre d’Espagne avec les combats devant Arles, Roncevaux avec
Aliscans. Voir ci- après, à l’appendice.
* Dans notre texte, Vivien est tué par Goliart, — et non pas en trahison, —
et il n’y est pas dit que ce Goliart fût roi de la Trape.
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60
LE ROMAN d'aRLBS
Lo palayspres et afugat 1 ,
Tôt’ a sa pensa e son eonfort
A que pogues venjar la mort
Vesian, lo noble baron *.
(Édit. Sardou, p. 44.
Conquist a y Arle e Narbona.
(Ibid., p. 65). C’est Charlemagne qui parle
Plus eran de cen millia li gent de fer coraje
E an près la marina et trastot lo ribage:
Non lor pot contrastar fort castel ni palays ;
Ad Arlle la cieutat son entrât de rellays. . .
Ar s’ajostan las ostz tôt drech en Aliscamps. . .
Crestians son vencut per la jent desastrada:
En Aliscamps son mort ail vas de Vezian,
Tan feramentz los an envazitz li payan..
(Ibid., p. 193.)
Il faut lire tout le chapitre, qui est intitulé : « Ayssi dis l’estoria
que apres la mort de Karlle Mayne*e dels autres que son scrichs en
l'estoria, fom la batalha en Aliscamps dells crestians am los sarrazins
els autres enfizels. » Ce qu’il importe de retenir de ce dernier extrait
de Raimon Feraud, qui paraît peu d’accord avec le premier, et où la se-
conde bataille d'Aliscans semble avoir été confondue avec la première,
dont elle aurait renouvelé le désastre, au lieu de le venger, c’est que
là, comme dans le premier extrait et comme dans notre poëme, il
n’est pas question d’Orange, et que c’est à Arles que tout aboutit.
598. Ici encore on peut voir une suite de la confusion déjà signalée
avec la légende de Constantin. Dans la Vie de saint Trophime, c’est
lorsque ce prince, quittant Arles, est revenu à Rome, que les sarrazins
arrivent en Provence. Ailleurs, on le met lui-même aux prises avec
1 C’est Louis, fils de Charles, et non Charles lui-même qui, dans notre texte,
prend, en dernier lieu, la ville d'Arles et la brûle. Celte divergence et celle qui
a été relevée dans la note précédente donnent lieu de supposer que Haimon
Feraud, ou l'auteur latin qu’il traduit, fait allusion à une version de la Prise
d'Arles avec laquelle ne concordait pas entièrement celle qu'a suivie l'auteur
de notre compilation.
3 M. Gaston Paris, citant ce passage, p. 258 de son Histoire poétique de
Charlemagne , dit en note:« 11 (Raimon Feraud) confond, semble-t-il, la prise
d'Arles avec la bataille d’Aleschans, en racontant que là mourut Vezian ou
Vivien.» Notre texte, où la même confusion se remarque (cf. ci-après,!. 1048),
prouve qu’elle devait aussi se trouver dans le poëme qu'a connu R. Feraud.
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60 LB ROMAN D*ARLB8
les sarrazins, lorsqu'il a bâti Cona tan fcinople. Voy. Graf, t. II, p. 104.
598. On lit ici, en marge du ma., d’une main postérieure (XVII* siè-
cle ?):« Sarazins en Arles. » — « foron »> ** furent, au sens de allè-
rent f Ou corr. abitat? C’est ainsi qu’a dû lire Nostredame ( qu'eran
habitats aqui).
600. «Nemze. » On lit Venise dans l’extrait publié par M. Lieutaud,
qui voit là le pagus d’où le Comtat Venaissin a tiré son nom. C’est
aussi ce qu’avait c<ftnpris Nostredame {la comtat de Venayssa.) —
« Aurenga. »Ms. AuregS. „
601. « Eilanon. » Sic» C’est évidemment, comme tout à l’heure, de
Lyon qu’il s’agit. Ainsi l’a compris Nostredame {et Aurenja jusquas
a Lyon). Corr. et Lavon t Cf. 588 et la note sur cette ligne.
602. 11 doit manquer après dieus, si ce mot est bien la bonne le-
çon, un verbe signifiant appela ou envoya. M. Lieutaud supplée man-
det, qui conviendrait fort bien.
605. Le ms. n’indique aucune lacune; mais il y en aune évidem-
ment avant ni mais de malvestat.
606. Nostredame introduit ici un personnage, le pape Léon III,
qu’il parait avoir emprunté à Philomena , roman qui lui a peut-être
aussi fourni l’idée, et en partie les termes, des deux discours qu’il
prête à Charlemagne.
610. «* Arle lo blanc. » J’ignore le motif de cette appellation. Ani-
bert {Mémoires sur Vancienne république d'Arles, t. III, p. 144),
après avoir constaté que « cette espèce de sobriquet » était connu
dès le Xlle siècle, que Roger de Hoveden, Joinville et Bertran Boia-
set s’en sont servis, ajoute : « Je serais fort en peine d’en assigner
la véritable signification. Je conjecture cependant qu’elle est pure-
ment morale, et qu’elle peut fort bien se rapporter à la vigilance avec
laquelle les Arlesiens s’étaient préservés de toute tache d’hérésie. » Je
croirais beaucoup plus volontiers que l’épithète doit être prise au
sens propre et matériel. Bouche déclare (1, 316) n’en pas connaître
l’origine.
613. « bars. » Ms. barc.
616. En marge, de la même main que plus haut: « La ville de
Fréta, maintenant dicte St-Remy. »
618. « Ü » *= t. Cf. la note sur 544.
619. « venqua. » Pour venga. Cf. jaques pour jagues (222).
629. « agran. » Ms. ogron. Cf. 809.
629. « volses », pour volcses (=» volguessetz).
632. « bies » = fr. pers (pares), influencé par ber. Ms. biês. Plus
loin, 742, on lit pies, qui est plus près de pers .
644. u Ar. » Ms. An.
645. « gens. » Écrit d’abord geng .
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fil
LB ROMAN D*ARLB8
653-690. Cet épisode, jeté au milieu d’un récit auquel, à cette place
du moins, il se lie fort mal, a tout l’air d’une interpolation. Poure (ou
Povre 1 ) Noirit rappelle à la fois Galien, du roman de ce nom,' et le
Povre Veü de Foulque de Candie . Comme Galien, il est fils d’Olivier
et d’une princesse délaissée par son amant; comme le Povre Veü, il
est né des amours d’une princesse sarrazine avec un chevalier fran-
çais ; et son nom n’est peut-être que le nom même de ce dernier,
inexactement traduit, ou traduit sur une forme altérée, telle que serait
Povre Peu. Peû, en effet, serait bien rendu en provençal par noirit ,
encore mieux par pagut, en quoi je soupçonne fort qu’il faut corriger
le agut de la ligne 685 # .
La mère de Poure Noirit, sœur de Tibaut, s’appelle Blancaflor. Ni
la mère de Galien, ni celle du Povre Veü ne portent ce nom ; mais
très-approchant est celui (Floripes) de la sœur de Fierabras, dont
l’amant, comme on sait, est Gui de Bourgogne. Or Gui est aussi le
nom de l’amant de Faussette, la mère du Povre Veü. Serait-il trop
hardi d’imaginer une confusion de plus et de supposer que notre au-
teur, après ses emprunts à Galien et & Foulque de Candie , en a fait
un autre (mais plus déguisé) à Fierabras ?
654. « bars. » On a écrit d’abord barg, qui a été effacé, puis bargs ,
dont on a effacé le g. Il est probable que, dans le ms. d’où provient le
nôtre, la distinction du g et de 1’$ était déjà difficile. Cf. ci-dessus,
sur 370.
655. « Noireit. » Corr. Noirit t Les formes de participe passé ne
manquent pas en provençal, qui renvoient analogiquement à ectus ;
mais je n’en connais pas de telle pour le verbe noirir .
657. « Se. » Ms. Me . conosc, qui suit, serait peut-être à corriger
consec .
662. « .j*. glant. » Corr. j. gantf La mesure, dans tous les cas, exige
un.
664. « bauestray. » Sic . Corr.?? On pourrait songer à travestray,
qui serait pour travertray d’un verbe travertir (trans vertere), qui
1 La forme provençale est paure. Cf. ci-dessus, p. xm, n. 1.
* Dans le Ciriffo Calvaneo , poëme italien du XV* siècle, dont l’auteur est
Luca de’ Pulci, frère de l'auteur du Morgante, le Povre Veü, qui en est le vé-
ritable héros, devient « il Povero Avveduto », ce qui est sans doute un essai
d'interprétation d'un nom dont la signification est assez difficile à déterminer.
L*auteur de Foulque de Candie , Herbert Leduc, paraît avoir pris veü au
sens de pourvu :
Pot ce qu'il est sans terre, s’ot nom Povres Veüs.
Voy. l’édition Tarbé, p. 68,
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*2 LB ROUAN d’âRLBS
n'aurait rien d’anormal, et dont la seconde r se serait, par dissimilation,
ohangée en s 1 . Le contexte s'en accommoderait on ne peut mieux.
670; « contar. » Répétition fautive (voir deux lignes plus haut)?
Corr. cercarf
685. « Poure agut. » Sic . Corr. Pagut ? Voy. ci-dessus la note sur 653.
691. « sigi » pour segui. Sec ou seguel seraient plus corrects, ou
du moins plus usuels.
693. « que bevia. » Corr. qu'en? — 701. « estas. » Ms. estag.
711. Olivier de Verdun est nommé dans Flamenca(v. 693)et ailleurs.
Sur ce personnage, que notre auteur parait identifier, à tort ou à rai-
son, avec le compagnon de Roland, voy. ce que dit M. Paul Meyer,
Romania , VII, 453, à propos d*un vers de Guiraut de Cabreira.
718. « desbrasatz », privés de l'usage de leurs bras. Manque à Rayn*
719. « briratz. » Ms. brirutz. Les chrétiens avaient les bras comme
paralysés à force de frapper, et étaient brisés de fatigue.
720. « a. » Corr. amf
726. « . j . bosc, penons, senieras. » Ceci, chez Nostredame, est de-
venu îou bosc appellat Baudierar, d'où les deux leçons divergentes
que présentent les textes A et B du Tersin de M. Paul Meyer 1 :
Beaudinar le premier, Baudieras le second. On en pourrait inférer
que Nostredame a eu sous les yeux un ms. du Roman d'Arles autre
que celui de Boisset, et dans lequel, au lieu de senieras, on lisait
bandieras.
730. « Senhor. » Ms. Senker .
743. Suppl, o devant aurif
744. Cet Alimon devait avoir la vie dure, car nous le verrons repa-
raître plus loin (1015) et combattre de nouveau.
745. Suppl, en devant an ?
747. « farian » =» fasian , se rapportant à colps; ou corr. ferian ?
758. « Garin », pour Agarin. Cf. 761 . — « gent » Ms. gens .
762-3. « Naimes de Baivieras. » A ce personnage, Nostradamus a
substitué, avec son audace ordinaire, un « Jaume, qu'era seignour de
Fretta. »
764. « gis » =» ges. Cette forme, aujourd'hui commune, manque à
Raynouard. Peut-être faudrait-il corriger gens (gentes).
767. Il doit y avoir ici une lacune; il faudrait un régime à amenar ;
ses machines de siège?
769. Saxi, dans son Pontificium Arelatense (Aix, 1629), p. 166,
1 Voy. dans la Revue des l. rom.,X, 150, quelques exemples certains, tels
que sastre pour sartre, du changement de r en s qu’on suppose ici.
* Romania, 1, 65. Cf. Revue, XX VIT, 87.
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LE ROMAN D*ARLBS 63
parlé de ces souterrains, peut-être d’après notre poëme, et il prétend
les avoir vus. Bouche, 1, 718, ne fait guère que répéter Saxi. Voici les
paroles de ce dernier : « Saraceni oppugnarant expugnarantque Are-
latem ; illos obsidione cinxerat viceratque Carolus : at victi se in tu-
tiora loca recepere ; cuniculos enim miro opéré fabricatos, in diversos
agrorum partes erumpentes, fecerant, quos annis præteritis vidimus. . . ,
licet fluentibus disjectisque temporum injuria fornicibus; quos etiam
insequutus ad internecionem pene delevit; ædemque cruci, ob inimi-
cos crucis Christi devictos, in ipso victoriæ loco dicavit. Hac de obsi-
dione quamvis taceant scripfcores, loquuntur lapides. » Suit le texte
de l’inscription, bien connue, de l’église de Sainte-Croix, dont Saxi
n'hésite pas à admettre l'authenticité. Cf. Anibert, Dissertation sur
la montagne de Cordes , pp. 47 et suiv., Romania , I, 57-58.
775. << si ran. » Ms. suan.
780. « fosas » = for sas (forteresses.)
783. « gens. » Ms. geng.
790. « Que volra », pour Qui v. Cf. ci-dessus, note sur 117.
794 « Bogas. » C’est Bougie, en Afrique.
799. « lo rey. » Ms. roy . — Il y a dans le ms. une s longue isolée
entre son et corin .
803 « demasipar. » Ce mot, qui manque à Rayn., doit signifier le
contraire à' émanciper, par conséquence soumettre fou dépouiller , si
de tôt n’est pas ici une locution adverbiale équivalant à totalement.)
810. L’auteur parait donner ici à asignar, si la leçon est sûre, le
sens un peu forcé de « obliger », « contraindre. » Peut-être faut-il lire
astguar, qui serait pour asigar, qui serait lui-même pour asijar (as-
siéger). J’ai signalé de pareils emplois abusifs du g pour y dans la Vie
de sainte Madeleine .
813. « lur iscan. » Ms. lus istam. Cf. 815.
820. « lan. » Ce serait la en ou la ne; cf. 382; mais il vaut sans
doute mieux corriger lay. Le copiste a pu prendre un y pour un » à
second jambage allongé.
830. « Odor. » Cf. 945. « La Crau est terminée au bord de la mer
par un rocher appellé dans les anciens actes la Roche d'Odor. » (Ani-
bert, Mémoires sur Vancienne république d’Arles , I, 103.)
831. Il y a évidemment une lacune après perpres, à moins qu’on ne
doive supprimer les deux de de cette ligne, en transportant la virgule
après perpres et en plaçant une autre après ter a. Nostredame rend
ainsi ce passage : « Estre aiibas a Houdour, descenderan en terra.
Lous moyssalhons non son tant especes comma eran lous sarrazins
per la Crau d’Arles. »
837. « asuavon. » On lit plutôt dans le ms. asnanon, qui ne signifie-
rait rien. Asuavon est intelligible, du moins en lui-même (afin qu’ils
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64
LE ROMAN d’aRLB»
le calment), aussi bien que les mots qui suivent. Mais le sens qui en
résulte ne parait guère d'accord avec le contexte. Y a-t-il une lacune?
839. « alages. » Mot peut-être emprunté au français. Rochegude a
alaia, alaia . Voy. D C, aléa , aleya , et Godefroy, alèe . La signification
es t celle de galerie , chemin couvert .
869. Ici commence la plus étrange confusion de Roncevaux et
d'Aliscans. On remarquera les répétitions et les contradictions que
présente cette partie de notre compilation. Il semble que l'auteur, non
content de prendre au hasard dans les chansons de geste du cycle ca-
rolingien, ait aussi emprunté, des noms tout au moins, à la geste de
la croisade D'où peut venir, sinon de là, Corbaran de Perse (870, 923)
et ce conseil tenu à Jérusalem (939) par le Soudan de Babylone 1 ?
877. « lo camp. >» Corr. Vacampt
881. « trastug », pour trastotz ; cf. tug, 933, pour totz . Des dialec-
tes modernes ont conservé ces formes dans la double fonction de sujet
et de régime (comme ici.)
888. Ms. Barvies; de même 892, 904. Mais cf. 763. Dans le ms.
d'où le nôtre dérive, l’i et IV, comme il arrive souvent, étaient peut-
être sujets à se confondre. La forme Bayviers , qui est la nôtre, sauf
la chute de IV, est, avec Bayvier , dans la Vie de saint Honorât ,
888. « Gandelbu. » C'est le « Gandelbodus rex Frisiæ » du Pseudo-
Turpin, Guandalbueys dans Saint Honorât (p. 60.) Ce personnage
figure dans Aimeri de Narbonne .
889. * « Augier lo vilan. » Il s'agit sans doute d'Ogier le Danois.
Mais d'où vient une pareille épithète? Serait-ce une corruption de
vaillant . Cf. 891.
889-90. « las sieuas gens; » Remarquer ici cet emploi de sieuas au
lieu de lor . Nouvel exemple à joindre à ceux que j’ai déjà relevés ail-
leurs. Cela est contraire à l’usage classique, mais conforme à l'usage
moderne de la Provence.
893 « Que »; pour Qtit. Cf. ci-dessus, note sur 117.
896. « cons. » Ms. cont ,
899. « li coms. » Cette forme li de l'article sing. sujet provient sans
doute directement de l'original français.
907. « anantat », honni ; pour enantaU de enantar, qui est dans
Raynouard, avec un exemple tiré de Saint Honorât,
909. « arle », pour aire,
910. « Blanc. » Ms. blant . — « pont canones. » 11 doit s’agir dupont-
1 On peut remarquer en outre qu’il y a, dans Godefroy de Bouillon , un
roi Corsuble comme ici (930), un Gerart l'Allemand comme ici (999, 1009) et,
comme ici encore (1006), 1015, etc.), deux guerriers sarrazins appelés, l’un,
Golias, et l'autre, Longin.
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«5
Le roman d’arles
canal sur lequel passait l’aqueduc que Charles fit couper, autrement
appelé pont de Barbegal. Voy. Ro mania, I, 66, n. 3. Canones (cano-
nesc ), adjectif qui manque à Raynouard, se rattache à canon [tuyau,
tube), considéré comme synonyme de canal.
911. « Bertran. » Ms. pean. 11 s’agit de Bertrand, cousin de Vivien,
et neveu, comme ce dernier, de Guillaume au court nez.
913. « Bertran t. »Ms. Bt, avec ou signe abréviatif.
917. « er el » ; pour es el .
930. « Corobli », 933. « Corubli. » C’est peut-être Corsuble, roi
d’Alyon, qui, dans Foulque de Candie , est tué par le Povre Veü 1 .
932. Tibaut, donné ici pour mort, va reparaître vivant un peu plus
loin (979 et suiv.).
935. « gens. » Ms. gengs,
937. « Jerualem. » Sic .
954. Suppl, de devant lus (qui est pour lurs.)
962. « lo Lieurant », corruption du f. loherain . — « Camba. » Corr.
Campaines (Champenois)? Cf. plus bas, 1009.
963. « Guirau. » Ms. Guirâ. Mais cf. 999 et 1009.
968. « gens. » Ms. gengs ; mais le g est empâté ; peut-être a-t-on
voulu l'effacer.
980. Le contexte semble exiger la suppression des deux négations,
à moins qu'on n’admette qu’elles valent ici une affirmation, ce qui
serait bien insolite.
932. « pesa a » = fr. pieça . Cf. ci-dessus, p. 479, n. 1.
983. « Corbaran. » Sic. Corr. Corubli . Cf. 933-934.
1005. Lacune ou passage corrompu? On ne comprend pas que le
fils de Marsile soit tué par un des siens.
1006. « Golias. » Ce personnage est, plus bas (1015, 1020, etc.),
nommé Goliart C’est lui qui fera à Vivien sa dernière blessure (1048).
11 figure dans Foulque de Candie et dans Aliscans; mais là c’est de
Haucebier que le jeune héros reçoit le coup mortel.
1007. « lo rey Garin. » Pourquoi Garin, qui est sans doute le même
que plus haut (962, 997), est-il ici qualifié de roi?
1011. Ms. companois . Cf. Borgonios , 1. 856.
1013. « Quels », pour Quils. Cf. ci-dessus, note sur 117.
1015. « Danttug et Alimon. » Le premier de ces noms est évidem-
ment corrompu s ; rapproché du second, il fait penser à ceux de Dathan
1 Sur un autre personnage à rapprocher de notre Corobli, voy. l’appendice
(II). Il y a aussi un Corsuble dans Fierabras.
* On pourrait lire aussi bien en deux mots Dant Tug, ou dant Tug ; mais
cela ne serait guère plus satisfaisant.
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66 Le ROHAN D* ARLES
et Abiron, qui reviennent si souvent, au moyen âge, dans une for-
mule d’imprécation, et qu’on aurait bien pu avoir l’idée d’appliquer à
des sarrazins, comme d’autres noms bibliques, tels que Goliath.
Alimon se ramènerait sans peine à Abiron par les intermédiaires
Amilon et Abilon; quant à Danttug,^ nom dont la physionomie est
si bizarre, on pourrait se l’expliquer par une mauvaise lecture de Da-
than, où l’n aurait eu cette forme particulière qui la fait ressembler
à un y .
1017. « fas. » Ms. fag .
1023. « non ti blande. » Ce verbe, si la leçon est sûre, est pris ici
dans une acception un peu forcée, car le contexte indique qu’il faut
entendre : « je ne te crains pas. »
1027. « ulham » ; pour vulham. Sur cette aphérèse du v, voy. ma
Grammaire limousine , p. 369.
1036. « Rainier Campaines. » Plus haut (1009), c’est uRichart Cam-
pâmes » que nous voyons accompagner Girart l’Allemand. Il y a
évidemment une erreur, soit ici, et déjà l. 1032, soit plutôt, peut-être
à la 1. 1009, où le copiste aura mal interprété une abréviation et écrit
Ricart au lieu de Rainier .
1040. « siam » =» nous étions. Sur cette forme, voy. ma Gram-
maire limousine , p. 373. Je l'ai constatée justement dans une pièce
d’un troubadour arlésien, composée vers 1290.
1041. « salvarian » =* ... riam. Le ms. a plutôt salvarien; mais
l’e, si c'est bien un e, est surchargé.
1046. « ma. » Sic , pour mas.
1052. « aperet », =* apezet , du verbe opezar (cat. apear ), qui
manque à Raynouard; mit pied à terre. Cela ne s’accorde guère
pourtant avec 1038-39, où l’on voit Girart trouvé mort par Vivien et
Guillaume.
1083. « al. . . » Lacune évidente, mais qui n’est pas indiquée dans
le ms.
1092. « Gallici la vila. » Cf. la note sur 582.
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TABLE DES NCLMS DE LIEUX
BT DK PERSONNES 1
Adam, 2, 21, etc.
Agarin (lo comte), 580. Voy. la note sur 576.
Agarin (lo castel), 761, 765, 771, 979.
Ai a von, 588 \ Voy. Livon.
Alamania, 855.
Alamans, 607.
Alimon, 735, 740, 744 *, 1015 \ 1019, 1021, 1028 ; Halimont, 1033.
Aliscam, 910.
Alvemas, 856.
Aras (lo rey), 576 \
Arlb, 525, 598, 599, etc.; Ahlk lo blanc, 610 % 614, 804, etc.
Arteclam, Articlam, 309, 428, 431, 441, 454, 457, 590. Voy. Ves-
perian, et la première note de la 3® partie, p. 521.
Audegier (lo rey), 581.
Audeguier (lo palais), 1072.
Augier lo Vilan, 889 *.
Augin (lo rey), 580. Voy. la note sur 576.
Aürenga, 600 \
Autan (lo rey), 582.
Autaves, 933, 983.
Avinhon, 600.
Azeva, 13% 21, 51, 58. Voy. Eva.
Babilonia (lo Soudan de), 934, 936, 939. Voy. la note sur 869.
Barbis, 528 *,541.
Bergon (val db), 127 *
Bertran (lo coms), 896, 900, 901, 911 *.
Bigart (le coms), 582 \ Voy. la note sur 576.
Bigart (lo castel de), 755, 975.
Blancaflor, 654, 673.
Bogas (lo rei de), 794 \
1 Les chiffres qui suivent les noms renvoient aux lignes du texte. Un as-
térisque indique une note. Les noms de lieux sont imprimés en petites ca-
pitales.
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68
LB ROMAN D*ARLB8
Bones de Tartaria, 580 * .
Borgonho8, 608, 856.
Boriana, filha del rey Augin, 579. Voy. la note sur 576.
Boriana (lo palais), 1071 .
Bubnes (lo palais dk), 1072. Voy. Bones.
Carbonier (lo rei). Voy. la note sur 576.
Carbonirr (lo palais), 1071.
Carie Maine (Mainier, 630), Carie, Karle, 603, 606, 619, etc.
Carie Maine (lo filh de), 1054. Voy. Lois.
Chérubin, 192, 207.
CONTASTIN (LO PALAIS), 534.
Corbaran, rey Corbaran de Pesa, rey
Voy. la note sur 869.
Corobli (lo rey), Corubli, 930 , 933.
Crau (la), 831, 946, 974.
Corbaran, 867, 870, 923, 983*.
Danttug, 1015*.
Eilavon, 601*. Voy. Livon.
Elegos, Elengos, 528*, 541.
Engles, 608.
Ermin (lo rey), 581*.
Escorie, 224*. Voir la note sur 219.
Espanha, 867.
Eva, 85, 90, 93.
Fransa, 638.
Franses, 607.
Frkgus, 430; Fréjus, 310*. Voir la première note de la troisième
partie.
Fréta, 616*.
Galia, 579.
Galic (lo rey), 582*.
Gallici, 1092.
Gandelbu, 888*.
Garin lo Lieurant, 962*, 998 ; lo rey Garin, 1007*.
Garin (lo castel), 758. Voy. Agarin.
Gascuenha, 855.
Gautier de Vais, 963, 998.
Gerart (Girart) i’Alaman, 999, 1009, 1033, 1038; Guirau TAlaman,
963*.
Gerkngost, 540*.
Gobas, Goliart, 1006*, 1015, 1020, 1027, 1041.
Gregs, 541.
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LB ROMAN d’aRI<B8 69
Guilhenmes (Guilhermes) al Comier, 963, 999, 1009, 1038, 1039,
1051, etc.
Guirau l’Alaman, 963*. Voy. Gerart.
Jesu Crist, 25, 225, 319.
Jherusalem, 273, 282, 319, 937, 939. Voy. la note sur 869.
Joan (don), 472*, 477.
Jozia, 222. Voy. la note sur 219.
Livon (= Lyon), 587 \
Lois (lo rey), 1069.
Longin, 1015, 1019, 1033.
Magin, 577*.
Malabrut, 1015.
Malbris, 1020, 1042.
Marcile, Marsile (lo rey), 828, 984.
Marselha, Masela, 599, 791.
Naimes de Baivieras, 763* ; de Baivies, 888*, 892, etc.
Narbona, 600.
Nemzb, 600*.
Noë, 218.
Odor (port d’), 830*, 945.
Olcvier, 653, 657, etc.; Olevier de Verdum, 710*.
Paris, 603, 610, 612, etc.
Picardia, 855.
Picars, 608.
Pilât, Pons Pilât, 299, 319, 323, 343, 364, etc.
Poure Agut, 685* ; Poure Noirit (Noireit), 653*, 655.
Rainier, 1032; Rainier Campaines, 1036*, 1039.
Ricart Camba, 962; Ricart lo Campaines, 1009. Voy. la note sur
1036.
Rolant, 634, 661, etc.
Roma, 303, 349, etc.
Roksasvals, 877, 929, 960.
Satanas, 85, 90.
Serar, Sezar, 303*, 326, 360, etc.
Set, 140, 141, etc.
Suria (lo rei de), 794.
Tibaut (lo rei), 619, 620, 624, 932*, etc.
Titus, 469.
Trofeme (Sant), 545, 553, etc.
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70
LB ROMAK D ARLB8
Truklba (lo rei delà), 581*. Voir la note sur 576.
Turqueza (la), 703.
Vandalins, 54t.
Verian, Vezian, Virian, Vizian, Varian, 062, 971, 993, 997, 1008,
1038,1039.
Vesperian, 465*, 468, 501* 589*, etc. Voj.Artedan.
Vezona, 474*.
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TABLE DES MOTS ET DES FORMES
RELEVÉS DANS LES NOTES
Abans, 23.
Alages, 839.
Anantat,907.
Anar, faisant fonction d’auxiliaire pour le parfait, 193.
Aperet, de apezar , 1052.
Arle, pour aire , 909.
Asignar, 810.
Bauestray, 664.
Bies (== fr. bers, pour per s), 632.
Blande, 1024.
Canones (pont), 910.
Caüs, 409.
Demasipar, 803.
Desbrasatz, 718.
Destres, 485.
Dieus, en fonction de régime, 116.
Dou (= daus ), 487.
Escalh, 480.
Escola, 228.
Esdelubre, 218.*
Gis, 764.
Guiron, 120.
Homs (bons), en fonction de rég. singulier, 560.
11, pron. pers. masc. sing., 173.
Le, art. masc. sing., faisant fonction de régime, 407.
Le, pron. pers. 3® pers., en fonction de datif, 558.
Li, pour i (ibi), 544, £18.
Li, pour lor (?), 253.
Li, art. masc. sing. sujet, 899.
Lon (=* los ne), 513.
Meravillos, 164.
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n
LE ROMAN D ARLES
Musardamens, 14.
Pant, 488.
Pies (= fr .pers), 632.
Post (= pois), 115.
Que, pour qui , 1 17.
Sans, en fonction de rég. sing., 320.
Sargans, 410.
Si, pour sia, 499.
Si (=* ici), 435.
Siam (= nous étions), 1040.
Sieuas, pour lor, 889.
Sota, 348.
Ulham, pour vulham, 1027.
Yespas, 313.
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APPENDICE
I
Voici Tex Irait, annoncé plus haut, du poeme sur saint Trophigne.
Il comprend le plus important pour nous de ce qui, dans ce poëme,
se rapporte aux luttes des chrétiens et des sarrazins sous Arles. Inu-
tile d’appeler de nouveau l’attention du lecteur sur les confusions
qu’on j remarque et qui, probablement, ne sont pas toutes involontai-
res. Je donnerai d’ailleurs en note les passages du Pseudo-Turpin
dont l'auteur s’est inspiré, ou qu’il a reproduits, avec plus ou moins
d’exactitude et de conscience.
Pueis lo bon crestia 1 lo luoc dezenparet
Et en Roma tôt dreg ell s’en anet.
Apres aysso sararins d’otra mar
Motas gens ajusteron, e vengron aribar
A j. port que es d’Arle, c’apelan Odor.
Aqui vengron an naus an joy et an baudor,
E trastoz son en terra de las naus deisendutz
E paseron la Crau ; ad Arle son vengutz ;
E fon fort gran la ost dels sararins ;
E conta nos Tropins *, . archivesque de Rems,
* L'empereur Constantin.
* Cf. Pseudo-Turpin, édit. Castels (VII e publication spéciale de la Société),
chap. XXIX, p. 55 : «Postes vero ego et Karolus cura quibnsdam exercitibus
nostris a Blavio discedentes per Qasconiam et Tolosam tendentes Arelatem
perreximus. Ibi vero invenimus Burgundionum exercitus qui a nobis in Hos-
tavalle discesserant, et per Morlaaum et Tolosam vénérant cum mortuis suis
et vulneratis,quos lectulis et bigis secum illuc adduxerant ad sepeliendum eos
in cimiterio )n Ailis campis, in quo cimiterio tune per manus nostras sepulturœ
traduotur Estultus cornes Lingonensis, et Salomon, et Sanson, dux Burgun-
diorura,ot Arnaldus de Bellanda, et Albericus burgundio, Guinardus et Estur-
mitus, Halto, et Tedricus, Yvorius, etBeraldus de Nublis, et Berengarius, et
Naamon, dux Baioariœ, cum decem millibus aliorum. Conslantinus præfectus
apud urbem Romani per mare delatus, cum aliis multis Romanis et Apulis,
sepelitur; pro quorum animabu3 uncias duodecim millia argenteas totidemque
talents aurea Karolus apud Arelatem egenis dédit.»
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74 LK ROUAN d’ ARLES
Que aqui era lo rey Caries Mayne,
An trastot son poder, et aqui los venquet.
Et adoncas trastotz aquels qu’eron borgonhons,
Tug li prinses e contes e li nobles barons
An près trastotz los mortz els nafratz,
E totz los borgonhons que son vieus escapatz
An carris totz los mors e los nafratz porteron.
Selh c’anar non podien an caval ameneron .
En Aliscans los portan aqui los sebelir,
E [i] fon lo comps fols de Leon* atressi,
E Salamon lo duc, e Sanson borgonhons,
Arnaus et Alberic, Estomit et Autos,
Teodoris, Ion, e le pros Berenguier,
E Berart de Nubles, so es de Mondeidier,
Naagra, le dux de Baiona * lo bar,
A[m]. ij.c. cavaliers sieuslos acompanhet.
An tant venc a saber a Karle,
E tantoat per sa ost e elh a ffag cridar
Que s'en anon an luy sell quel volran amar.
E parti si de Blavia, per Gascuena paset,
E passet per Toloza, ad Arle s'en annet ;
E aqui atroberon la ost dels Borgonhons
Que an los'sararins se combaton tôt jorn,
Et avian tans mortz que la terra en cubria
E per tota la ost tôt l’ayze en pudia.
Adons, so dis Tropins, per lo fils de Dieu
Sus en las sebouturas los ay benesit ieu.
E cant Karle fon aqui,
Anb ay tant . j . homs novelhas aportet
Que Contastins, que fon del mont senhor *,
Ffo sebelit en Alisquans an grant honor,
An ganre de cavalliers romans e poiles ;
An lo rey Contasti los aporteron lai ns,
E son tug sebelitz, si com homes onratz,
An grans prosesios el sementeri sans.
1 L'auteur n'avait sans doute jamais entendu parler d'Estout de Laogres ;
autrement il n'aurait pas si étrangement traduit le « Estultus cornes Lingo-
nensis»du Pseudo-Turpin.
2 Voilà encore une étrange traduction. Evidemment Naime de Bavière était
aussi pour notre auteur un personnage tout à fait inconnu.
3 Le « Constantinus præfectus » du Pseudo-Turpin devient ici le grand
Constantin. Ce que l'auteur ajoute rend difficile de croire aune simple bévue.
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75
LB ROMAN d’aRLES
Carie o auri, mot lo moc pietat ;
Perlas armas d’aquells mot deniers a donatz,
Xÿ. m. onsas d’argent als besonhos,
Atrestant bezans d’aur per Dieu le glorios.
E cant Karle auzi que tantz homes mortz son 1
En aquelas batalhas e non conois qui son,
Fes preguieras a Dieu que li demostres
Cals eran crestians vo sararins.
E Dieus notre seiïhor, plen de pietat,
Las preguieras de Karle a tantost es auri t,
Que trames monimens de marbre obratz
E de totas manieras de peiras que queras,
E trames n’i Dieus tant el sementeri sans,
C'on non los nombraria s’i ponhava .c. ans.
E vengron tug ensems li vas en .j*. nueg
Von li crestians forotf sebelitz sens enueg.
Aras poyrias, senhors, tug a prezent vezer
Con Dieus nostre senhor a als martirs plazer.
Cant la ost del rey Karle ac lur tendas fermât,
Ay tantost commandet lo rey a sson barnaje
Que quascun s’aparelhe de la batalha far,
E preget Jesu Christ que li fesa conoysser *
Totz aquel[s] qu'en la batalha deuran remanir.
Et esgardet e vi que cros tant 3 luriron
Encontre lo solhel sel que morir devion.
* Voici maintenant le passage mentionné plus haut, p. 58, n. 3, et où est
raconté le miracle rapporté dans la seconde partie de l’extrait de la Kaiser -
chronik que j'ai cité.
* Nouvel emprunt au Pseudo-Turpin (chap. XVI, p. 28) ; mais l'auteur
transporte à Arles un événement que le texte qu’il copie place en Navarre :
« Rarolus namque vero, antequam bellum esset, rogavit Dominum utoslen-
deret ei illos qui roorituri erant de suis in bello. Die vero crastina, armatis
Karoli exercitibus, apparuit rubeura signum dominicæ crucis in humeris mori-
turorum rétro super loricas ; quos ut vidit Karolus, mox retrusit illos in ora-
torio suo ne morerentur in bello. Quam incomprehensibilia sont judicia Dei et
investigabiles vi© ejus! Quid plura? peracto bel'o et perempto Furre cum tri-
bus millibus Navarrorum et Sarracenorum, quos custodia retruserat Karolus,
reperit exanimatos, eterat numerus illorum circiter centum quinquagintal O
Christi pugnatorum sanctissima caler va! etsi gladius persecutoris eam non
abstulit, palmam tamen martirii non amisit. »
3 Corr. que de cros tôt?
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76
LB ROMAN ü’ ARLES
El rey fes los enclaure, que los cujet gardar ;
A la fort mort de glasi los volgra escapar ;
Mas Dieus a la mort los a sentenciatz,
La sentensa dura a d’autramens mudat ;
Que adons quel rey Karle fon retornat
De la batalh’ a l’ost, et el a atrobat
Mortz tos los quavaliers qu’euclauze fag avie ;
Et an mot gran dolor lo rey totz los planhie,
E fes venir los preires e los clers de la ost
E totz los cors dels mors an grans cans sebelir
En los vasses, dizent lur bons absolvemens
E la ssanta orasion(s) del payre omnipotent.
Permieramens lur armas sont davant Dieus,
Sus lo sobeira sel laz an angils portadas,
En deven creire tug qu’elh sien martirs
E que tug sien al gag de paradis.
Suit le récit d’un miracle accompli par saint Trophime : Un cheva-
lier a donné un soufflet à l’archevêque Turpin. Charlemagne le con-
damne à mort, avec neuf de ses parents. On les pend ; mais saint
Trophime, dont ils avaient invoqué la protection, soutient leurs corps
et les conserve vivants pendant huit jours, au bout desquels, après
avoir repoussé une attaque des Sarrazins, une partie de l’armée chré-
tienne, passant par l’endroit appelé les Fourchons , où ces chevaliers
étaient pendus, constate le miracle. Turpin et Charlemagne pardon-
nent, et les chevaliers, abandonnant le siècle, se consacrent à Dieu et
à saint Trophime.
11 n’est plus ensuite question de Charlemagne ni des Sarrazins.
II
Dans un ouvrage rempli de fables ramassées de côté et d’autre, et
auxquelles l’auteur a dû plus d’une fois mêler ses propres imagina-
tions, la Royale Couronne des roys d % Arles, par M. I. Bouis, pres-
tre (Avignon, 1641), on trouve, p. 110 et suiv., un chapitre intitulé:
« Comme l’Empereur Charles deslivra Arles du siégé des Sarrazins,
et du séjour qu’il fit dans la ville. » Parmi les sources, assez diverses,
de ce chapitre, on distingue sans peine, outre l'inscription expressément
désignée, et d’ailleurs reproduite, de Sainte-Croix de Montmajour *, le
1 Sur celle inscription, voyez ci-dessu?, pageG3, note sur la ligne 769.
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LE ROM AM D* ARLES 77
Pseudo-Turpin , le Philomena, le poëme sur saint Trophime. Les em-
prunts au Roman d'Arles , s'il y en a eu, sont moins évidents, et en
tout cas moins nombreux et moins importants. Peut-être est-ce de là
que l'auteur a tiré le nom d’un roi d’Arles, qui figure (p. 114) dans
l’énumération, empruntée au Philomena , de seize rois sarrazins de Pro-
vence ou de Septimanie, vaincus par Charlemagne. Le Philomena ne
fait que mentionner parmi les autres, sans même le nommer 1 , ce pré-
tendu roi d’Arles ; tandis que Bouis, outre ce qu’il raconte de lui et
dont le Philomena ne dit rien, lui donne le nom de Cordube, qui s’é-
loigne assez peu du Corobli ou Corubli (= Corsuble?) de notre texte
(930,933) pour qu’on puisse supposer sans invraisemblance que c’est
de là qu’il vient. Voici, avec le passage auquel je fais ici allusion, un
ample extrait de ce qui précède et de ce qui suit (pp. 110-120). Tous
nos lecteurs pourront ainsi comparer avec notre roman le récit soi-
disant historique du bon prêtre Bouis s .
a Comme l'Empereur Charles délivra Arles du siégé des Sarrazins,
et du séjour qu'il fit dans la ville.
» Les Sarrazins ayans honteusement estez chassez d’Arles par les
victorieuses armes de*Charles Martel, ils ne perdirent pourtant l’envie
de ruiner la France, ains ayans renforcé leur armée, tant par mer que
par terre, vindrent la seconde fois d’Espagne en Languedoc et Pro-
vence, et gaignerent tous les ports de mer qui leur pouvoient donner
du trouble, afin d’avoir la libre entrée et sortie du royaume : ce qu’ar-
riva l’an 767 pendant le régné de Pépin , fils de Charles Martel, et
8’estendirent jusques à Lyon, dans la Bourgogne, la Gascongne et en
la Guienne, exerçans toute sorte de cruautez pour se venger des fran-
çois ; mais l’année suivante, l’empereur Pépin mourut, et son fils
Charles, surnommé le grand, ou Charlemagne, succéda au royaume
de France, et peu à peu à l’Empire. Estant couronné empereur par le
pape Leon 3, en recompence de ce qu’il l’avoit estably à son siégé,
vint promptement en France pour délivrer son royaume de l’oppres-
1 Du moins dans le texte provençal du ms. de Londres, si je m’en rapporte
à un extrait de ce ms. que s’est procuré M. Frédéric Fabrège et qu’il a bien
voulu me communiquer; car, dans la version latine publiée par Ciampi, on lit
(p. 26): « quintus A ly rex aralatensis. »
* Au commencement de ce siècle, un historien de la ville d’Arles, Noble La-
lauzière, reproduisait encore sans hésitation une partie des fables accueillies
par Bouis. Voy. l 'Abrégé chronologique de V histoire d’ Arles ( 180S), pp. 93
et 94.
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Î8
LE ROMAN D* ARLES
sion des Sarrazins, et avec une forte armée les chassa de la Bourgo-
gne, du Lyonnois , de la Guienne , de la Gascongne, du Languedoc,
et passant les monts Pyrénées, les poursuivit jusques à Gironne et
Barcelonne, où il en fit une grande défaicte ; et donna en action de
grâce à l’eglise cathedralle de Gironne, apres l’avoir faicte reedifier
(car les Sarrazins l’avoient tombée ) une image ou une statue de la
Vierge d’argent doré, de la hauteur de six pans, qui est encore gar-
dée dans ladite église.
» De là, poursuivant ses victoires, sçachant que cette barbare ver-
mine estoit encores en Provence, et tenoient assiégée la ville d’Arles,
8’estans fortifiez dans les montaignes de Montmajour et Cordes ; y vint
promptement et passant le Rosne, donna si heureusement la charge à
ces infidelles, que depuis Montmajour, Sainct Remy et jusques à la
Durance, qu’il y a plus de six lieues d’estendue de pays, furent tuez
plus de 200,000 Sarrazins, ce qui arriva le 3e jour de may 799, feste
de l’Invention de la saincte Croix, premier an de son empire, et 32.
de son régné : en mémoire et action de grâce de cette victoire, cet Em-
pereur fit à ses despens bastir l’eglise de Sainte Croix, qui est au pied
de la montagne de Montmajour, et appellant tous les religieux de l’ab-
bave de St-Pierre, qui à cause des oppressions des Sarrazins, s’es-
toient fuis qui sça qui là pour sauver leur vie, donna des grands reve-
nus à l’abbé, pour l’entretien d’iceux, et entra dans Arles, le 5 may, où
il fut reçeu par l'archevesque Lupus, la noblesse et le reste des habi-
tants : qui tous se confessoient autant ses obligez de les avoir empes-
chez de rechoir soubs l’esclavage des barbares que jadis les Grecs
l’estoient à leur Hercule, apres qu'il eust suffoqué le lyon Nemean,
l’hydre de Lernes, le sanglier d’Hérymanthe et purgé le monde de
Diomède. La preuve de cette victoire est confirmée par Eginhardus,
en la Vie de Charlemagne , et par l’inscription gravée sur une pierre
de marbre en caratheres fort anciens, dans ladite eglise de Saincte
Croix, où ces parolles se lisent avec facilité :
» Noverint universi . . . . (l’inscription connue).
» L’inscription de ceste pierre estant si ancienne devroit estre une
assez suffisante preuve de la vérité de cette histoire, bien que l’histoire
de France ne l'aye marquée particulièrement. Il y a encores une autre
preuve d’icelle dans les Archives du monastère de Nostre Dame de
Grâce au diocese de Carcassonne, où est dit que despuis l’an 790, que
l’empereur Charlemagne faisoit bastir ce monastère, jusques au temps
de ceste victoire : ce prince vainquit seize rois sarrazins qui ensemble-
ment avoient une armée composée de 170,000 hommes de cheval et
deux cens mille piétons, tous bien adroicts à la guerre, qui s’cstoient
campez par la Provence, le Languedoc et la Catalogne, tenans pour
leur refuge les plus belles et fortes villes: car le roy Codube 2., neveu
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ï®
LE ROMAN d’aRLHS
d'autre Cordube, que le prince Charles Martel avoit chassé d’Arles,
estoit venu camper à Montmajour, Cordes et Fontvielle, se disant Roy
d’Arles, et mourut k une bataille près de Carcassonne, l’an 790 4 . La
mort duquel ne descampa pourtant ses gens des frontières de Mont-
majour ; le roy Athin estoit en Avignon, Matran à Narbonne, Gale-
nian au Vivarez, Cohatinan à Orange, Corbin à Nice, Blablet k Givau-
dan, Eberinth à Uzes, Corban k Venisse ou Venasque*, Finem k Lau-
deve, Tamarin à Ma galonné, Danabut k Beziers, Garantus en Agde,
Achilan à Taragonne, Satin à Barcelonne et Mahomet à Gironne : car
Agolam leur grand empereur estoit dans l’Espagne. . .
» L’un des plus grands contentemens que l’Empereur Charlemagne
receut dans Arles pendant une année qu’il y séjourna, estoit de con-
templer la situation de la ville et la beauté du saint cimetiere d’Alys-
camp, qui estoit un exemplaire très-puissant pour confirmer les chres-
tiens en lafoy de l’evangile: mesmes quand on I’asseuroit que ce ci-
metière avoit esté beny de la main de Jesus-Christ, qui s’estant appa-
reu aux evesques qui le vouloient bénir, luy mesme donna la béné-
diction : que les morts y venoient dans leurs bierres sur le Rosne sans
la conduite de personne et es tans aux endroits d’iceluy s’arrestoient,
sans aller ny en bas au fil de l’eau , ny contremont la rivière, comme
es tans attirez à cette terre pour y attendre la résurrection des morts,
et en compagnie des saincts qui sont enterrez en iceluy aller compa-
roistre au dernier jugement en la valée de Josaphat : et surtout quand
on l’asseuroit que son parent Sanson, pere du comte Gérard de Vienne,
qui estoit mort à la bataille de Roncevaux, et ses neveus Willelme et
Vesian, et plusieurs autres barons et chevaliers qui comme saints
athlètes estoient morts à la bataille de Montmajour, y estoient en-
terrez, pour lesquels il faisoit faire des continuelles prières . . .
» Le concile d’Arles finy, 'et la ville remise en asseurance, l’Empe-
reur partit pour aller aux Allemagnes, et laissa dans Arles Théodore
son fils naturel pour duc et gouverneur de toute la Provence ; que fut
le lendemain de Pasques de l’année 801. »
* Philomena (Ciampi, p. 34) : « ... et fuit ibi mortuus rex aralatensis. »
* Lisez à Nismes; erreur résultant d’une mauvaise lecture de Nemze, et
pareille à celle qu’ont commise Nostredarae et le copiste du fragment du Ro-
man d'Arles publié par M. Lieutaud. Voir ci-dessus, page 524, note sur la
1. 600. Dans le Philomena, on lit (Ciampi, p. 27): «... sextus Corbinus rex
nemausensis » ; (ms. de Londres) : « lo . vj . , qu’a nom Cobrin, es rey de Nimze. »
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80
LE ROMAN D* ARLES
III
Je dois à l’obligeance de mon excellent collègue, M. Antoine Tho-
mas, de pouvoir donner ici un opuscule latin dont la dernière partie
paraît être le résumé d’un récit analogue à notre Roman d* Arles,
mais dans lequel on avait fait entrer, — ce qui n’a pas eu lieu dans le
Roman d'Arles, du moins tel que nous le possédons, — la deuxième
chanson d 'Aliscans, celle dont le véritable héros est Rainouart au
Tinel. Les parties précédentes de cet opuscule sont: 1* un long récit
emprunté au poëme sur saint Trophime (v. 1-274), ou du moins à la
même source où a puisé l’auteur de ce poëme ; 2° le chapitre xxvm du
Pseudo-Turpin (édit, de la Société , p. 53), transcrit littéralement;
3° la fin du chapitre xxix du Pseudo-Turpin ( ibid ., p. 55, 1. 26, —
p. 56, 1. 7) 1 ; 4° le récit du miracle raconté dans Saint Trophime (voir
ci-dessus, p. 75) et dans la Kaiser chroni le, mais avec de notables diffé-
rences. Ces quatre parties, et la cinquième, dont j’ai parlé en premier
lieu, se suivent sans interruption dans le ms. Je les distinguerai ici,
pour la commodité du lecteur, en donnant à chacune un numéro d’ordre.
Le ms. d’où ce texte provient, et dont M. Thomas m’a communiqué
une description détaillée, a dû être exécuté en 1360. C’est le ms. 965
du fonds palatin de la bibliothèque vaticane, lequel comprend, sans
la table, 268 folios et se compose presque en 'entier d’ouvrages du
célèbre dominicain Bernard Gui. Vers la fin sont des extraits de divers
auteurs, qui ont pu être faits par le même personnage. Est-ce le cas
du texte qui suit? Je ne me hasarderai point à l’affirmer. Ce texte
occupe les feuillets 264 à 266, et il est le quarantième des articles
dont le ms. se compose.
Qnaliter et quotiens civitas Arelatensis, que est sita in comitatu
Provincie, fuit acquisita per Christianos.
1. — Beatissima Martha, felix et carissima hospita Christi aefidelis
et dulcissima ejus discipula, congregatis apud Terasconem, instinctu
divino, causa visitandi ecclesiam et consecrandi eam, quam nomine
Christi et beate Marie ibi construxerat, tribus episcopis ex .lxxij *>aa -
discipulis Jhesu Christi, Trophimo scilicet Arela tensi, M aximino Aquen-
si, Eutropio Auraisensi, et aliis pluribus vins religiosis et mulicribus,
reconditis ibidem multis sacris et preciosis reliquiis, quas secum cum
studio magno et labore de ultramare attulerat, predictam ecclesiam a
1 Cf. Saint Trophime, vers 719-759 (ci-dessus, p. 73-75;.
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tribus episcopis prefatis fecit consecrari. Prelibata vero ecclesia ex
more Ecclesie honorifice dedicata, supradicti sancti antistites, cum
beata Martha et quibusdam aliis .iiij. episcopis de numéro .lxxijo™».
discipulorum Jhesu Christi, Marciali Lemovicenci, Sergeo Paulo Nar-
bonensi, Sargio Tholosano, Frontone Petragoricensi, heroes omnes
oraculo divino amoniti, apud Arelatensem urbem, quam egregius doc-
tor Paulus apostolus ad fidem convertit, in loco qui dicitur Aliscam-
pis, ubi beatus Trophemus, discipulus Apostoli Pauli et ab eodem in
predicta urbe episcopus constituais, quoddam oraculum in honorem
Dei genitricis Marie contruxera(n)t, ad consecrationem cimiterii, in
quo fidelium utrimque persone requiescunt in pace debeant sepeliri (sic),
pariter convenerunt. Quod cum dominus Jhesus Cbristus per manus
illorum .vij . antistitum divinitus consecrasset, corporalem presentiam
in loco illo eis dignatus est exhibere, ita quod .vij . episcopi et omnes
alii qui aderant cognoverunt eum, non in terro gantes eum : « Tu qui
es? » scientes quod Dominus est. Tune dominus Jhesus, elevatis ma-
nibus, benedixit eis, una cum cimiterio in quo erant, et confortans eos
et docens de regno suo, consecrationem ipsius cimiterii, quam, eo
coopérante et auctoritatem eis impertiente, consummaverunt, appro-
bavit et confirmavit ; et spiritalit[er] concessit et precepit ut nullus
christiane fidei caractère insignitus et in ea usque infinem perseve-
rans ab illius cimiterii sepultura unquam prohiberetur, ingens pre-
mium et grande meritum illis, qui in eo catholice requieverint, e ter-
nam vitam promittens, quique in communione Ecclesie decedentes illic
catholice tumulati fuerint; nichilominus etiam illorum corpora ab
illusione et vexatione demonum ille qui fidelis est in omnibus rebus
suis spopondit esse tuta, et in ejus nomine nunquam in eorum monu-
mentis immundi spiritus valeant habitare. Desiderant enim in sepul-
chris mortuorum manere, juxta illad Evangelii : « Exeunte Jesu de
Naii, occurrit ei de monumentis homo in spiritu immundo qui habebat
domicilium in monumentis. » Etpreterea, ne corporum illorum materia
tanquam figmento nobis organo maligni spiritus uterentur concessit,
unde cum exeunt incorporel et invisibiles in forma corporali et visi-
bili volunt aliquibus apparere. Ipse Sathan transfiguravit se in ange-
lum lucis, quod dominus Deus occulto judicio facit aut promissu suo
ita fieri sinit. Hiis itaque ad laudem et gloriam ac robur et muni-
men christiani nominis de Dei ineffabili bonitate peractis, unigenitus
Dei filius, iterum benedicens illis et cimiterio suo et valedicens omni-
bus, ex oculis eorum evanuit, ad dextram consedens Majestatis in ex-
celsis. Discipuli vero, divine visitationia et celestia muneris supra quam
dici potest gratia jocundati, summe Trinitati, simplici Dco, de tantis
beneficiis gratias exhibentes, in memoriam dominice visitationis et
apparitionis, in loco ubi steterint pedes ejus et seipsum corporaliter
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exhibuit, in honorem beate semperque virginis genetricis Dei Marie
erexerant de terra al tare, juxta ritum VeterisTestaraenti, verbi causa :
« Al tare de terra faciatis michi.» Et illud, débita solempnitate adhibita,
cum summadevotione et reverentia, cum oratorio quodbeatus Trophi-
mus Effesinus, Arelatensis episcopus, ad ortum solis construxerat,
caute consecraverunt episcopi, aree marmoree ad posteriorum mémo*
riam grec a clementa altius elevantes, que summatim omnia tangunt et
recte intelligentibus manifestant. Et statim ipsum altare divinis obse-
quiis et officiis ordinare studuerunt. Et ipse beatus Trophimua Ephe-
sinus sese, cum debitum carnis aolverit, a fratribus suis sepeliendum
precepit et affectuose rogavit. Hiisque omnibus rite peractis, omnea
cum gaudio ad propria remearunt Tune defunctorum corpora amici
eorum diversis aromatibus condiderunt ; alii murra, alii balsamo, alii
sale diligenter perfuderunt. Multa corpora per yentrem trudebant et
stercora eiciebant, et alii aromata non habentes sale condiebant ; alii
feretrum ligneum ad ferendum ea aptabant, alii humeris, alii inter ma-
nns ferebant infirmos, alii vulneratos in scalis super colla sua porta-
bant, alii alios ibidem sepeliebant, alii usque ad Galliam vel ad pro-
prium locum deferebant, alius portabat alium quousquein putredinem
dissolverentur et tune sepeliebant ipsos. Inde visitandum est, juxta
Arelatensem urbem, cimiterium defunctorum, quod dicitur Aliscampis,
precibus et solitis elemosinis, ut moris est, pro defunctis orare, cujus
longitudo et latitudo uno miliario constat. Tôt et tanta vasa marmo-
rea super terram si ta in illo cimiterio nunquam possunt inveniri ; sunt
etiam diversis operibus et latinis litteris insculpta et dictatu intelligi-
bili antiqua ; quanto magis longe prospexeris, tanto magis longe sar-
cofagos videbis. In eodem cimiterio septem ecclesie habentur, in qua-
rum qualibet si quis presbiter eucaristiam pro defunctis confecerit, vel
laycus sacerdoti devote celebrare fecerit, vel psalterium clericus lege-
rit, vel ibi sepultus fuerit, veraciter très illos sanctos defunctos qui ibi
jacent sue salvationis adjutores in novissima die coram Deo habebit.
Multa corpora sanctorum, martyrum et confessorum ac virginum ibi
requiescunt, quorum anime in paradisi sedibus congaudent. Eorum
namque commémora tio post octavas Pasche feria . ij* . ex more cele-
bratur.
II. — Et erant tune temporis bina cimiteria sacrosancta celeber-
riraa precipua, alterum apud Burdegalam, alterum apud Arelatem in
Aliscampis, quod per manus septem antistitum sanctorum Maximini
Aquensis, Trophimi Arelatensis, Pauli Narbonensis, Saturnini Thoio-
sani, Frontonis Petragoricensis , Martialis Lemovicensis, Eutropii
Xanctonensis Dominus consecravit. In quibus maxima pars illorum
sepelitur. Et illi qui acie Montisgasini gladiis intacti(s) obierunt in
hiis cimiteriis, aromatibus peruncti, sepeliuntur.
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III. — Postvero ego Turpinus, Remensis archiepiscopus, et Karo-
lu8, cum quibusdam exercitibus nos tris, a Blavio discedentes et per
Ga8Coniam et Tholosam tendentes, Arelatem perreximus. Ibi [in]-
venimus Burgundioni humanitus 4 qui a nobis in Hastavalle discesse-
rant et per Tholosam et Morlanum vénérant cum mortuis suis, vulne-
ratis, equis multatis bigisque secum adduxerant, ad sepeliendum eos
in cimiterio de Aliscampis; in quo cimiterio tune per manus beatas
sépulture redduntur Stulcus, cornes Lingonensis, et Salomon et Suli-
son, duces Burgondienses, et Arnaldus de Burlanda, et Albaricus
Burgundionus, et Stumitus, Ato, et Streditus, Jornis, et Bernardus
de Nubis, Berengarius et Naaman, dux Boyonie, cum decem milibus
aliorum. Constantinus vero, prefectus urbis Rome, per mare delatus
cum aliis multis Romanis Apuleis sepelitur; pro quorum quoque ani-
mabus .xij. milia uncias argenteas totidemque talenta argentea Ka-
rolus apud Arelatem egenis dédit.
IV. — Cum Karolus civitatem Arelatensem, quam tune temporis
Sarraceni tenebant, obsedisset, cum exercitu infinito, precibus ipsius
Caroli, dominus Jhesus una nocte innumerabilia sepulchrorum milia
ex marmore et alio genere vario diversis lapidibus miraculose opera-
tus est, ad opus illorum qui, in obsidione ilia, a Sarracenis, pro no-
mine suo, in illo loco vel quocumque alio, interficiendi erant. Sed
dominus Jésus, pia intercessione Karoli, sentencia sua in melius
misericorditer commutata, tune in expeditione ilia gladio morituros,
corporum et animarum in eorum auxilio angelorum dissolutione facta,
sicut continget in secundo adventu Domini, cum illi qui residui erunt
rapientur ab angelis Christo in aéra, ita beatificantur quod spiritus
ad gloriam et regnum suum per manus angelorum suorum simul
transtulerit et eorum corpora supradictis sepulcris honorifice ad lau-
dem et gloriam norainis sui collocav[er]it. Quo miraculo peracto, Ka-
rolus, cum desiderio sui exercitus, pugnavit cum Sarracenis, et, eis
devictis, civitatem cepit et eam Christianis tradidit.
V. — Item 2 Sarraceni de ultra mare et citra non raultum post cepe-
runt civitatem Arelatensem, et eam de suis munierunt. Iterura venit
Karolus de Gallia et expulit viriliter Saracenos, et retinuit civitatem 3
cum suis.
1 Sic . Il faudrait Burgundionum exercitus . Tout cet extrait du Pseudo-
Turpin est plein de fautes, dont je ne relève que celle-ci, le lecteur pouvant
le comparer au passage correspondant, rapporté plus haut, p.73, n. 2, de
l'édition Castets.
* Sic. Corr. Iterum ?
s En marge: la captio Arelatis .
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LB ROMAN D’ARLES
Itorum invaluerunt Sarraceni et hostiliter ceperunt civitatem et
munierunt eam 1 .
Iterum tertio venit Karolus, et manu forti recuperavit civitatem*
et tenuit ad vitam suam. Post mortem vero Karoli, iterum Sarraceni
pugnavçrunt contra civitatem et violenter recuperaverunt eam, et ten-
uerunt eam usque ad tempora Vasiani; et post parvo tempore Vasia-
nus, congregato exercitu, venit Arelatem et pugnavit in campo cum
quibusdam regibus Sarracenorum, qui vénérant de partibus ultrama-
rinis et cum quibusdam aliis terre citramarine. Tandem judicio di-
vino interiit Vasianus in Aliscampis et fere oînnes socii ejus, quo au-
dito per Guischardum, fratrem ejus[dem] Vasiani, qui interfuit bello,
beatus Guillelmus congregavit exercitum fortem nimis, et venit Arela-
tem et pugnavit contra predictos Sarracenos in Aliscampis ; et contigit
quod omnis exercitus ejus et omnes barones sui fuerunt interfecti aut
capti, ita quod solus ad Aura[s]icam, civitatem suam, unde venerat,
fugit. Tandem ivit ad Ludovicum, filium Karoli, apud Lugdunum, et
vix quarto impetrato ab eo exercitu, venit in Aliscampis cum Ray-
noardo de Truello 3 etmultis aliis pugnatoribus, bellum conflixit cum
regibus et principibus Sarracenorum et triumphavit de omnibus, ita
quod Bertrandum, comitem Pala(s)tinum, et Guischardum, fratrem ejus,
et alios qui capti erant ab eis recuperavit, et hoc precipue per virtu-
tem Raynoardi de Truello, qui fregit naves et galeas eorum. Et exinde
cepit civitatem 4 et reddidit eam Christianis. Et postea non fuit capta
civitas a Sarracenis, et omnes mortui christiani in Aliscampis in con-
flictu illo sépulture traditi fuerunt, ad quam nos perducat. Amen.
1 En marge: 2a captio ejusdem.
* En marge : 3<> capitur Avelas,
3 On remarquera cette altération du surnom de Rainouart au Tinel. L'auteur,
dans ce dernier mot, lu par lui tontel, voyait sans doute un nom de lieu, et peut-
être l'identifiait-il avec la Trouille ( Tt*uelha ). Cf. ci-dessus, p.56, n. sur 576.
4 En marge: 4° capitur Arelas civitas.
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ADDITIONS ET CORRECTIONS
P. 45, entre les lignes 7 et 8, une erreur de mise en pages a fait
omettre la note suivante, à laquelle renvoie la table des noms, p. 67,
au mot Azeva :
13. « Azeva.» Cette forme (aussi Adeva) se rencontre ailleurs. Voy.
les Denhmader de M. Sucliier, pp. 470 et 572, et cf. Azaxs = Ain
(Aix-en-Provence), forme qui résulte de l’agglutination au nom de la
préposition az ( = ad),
P. 53, 1. 6, lis. Vespasianus .
P. 54, 1. 10 du bas, lis. 49 au lieu de 513.
P. 55, note 1 au bas de la page, ajouter : De ce vers du Roland on
peut encore rapprocher cettfi-ci de Foulque de Candie (édition Tarbé,
p. xxxj):
Fille de l'amirant qui tient le vox (corr. val ?) de Bire,
et un passage de l’office de Girone où il est question du «Val de Pire »,
en même temps que du Roussillon et d’un lieu appelé Sa Clusa, men-
tionné aussi dans PhÜomena(C\uvci\>\, p. 51), sous la forme La Clusa .
Voy. Gaston Paris, Ilistoire poétique de Charlemagne, p. 280,
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TABLE DES MATIÈRES
Fages
Introduction vu
Le Roman d’Arles 15
Notes 45
Table des noms de lieux et de personnes 67
Table des mots et des formes relevés dans les notes 71
Appendice. — I. Extrait du poème sur saint Trophime 73
— II. Extrait de Bonis, La royale Couronne des roye
d’Arles 76
— III. Qualiter et quotiens civitas Arelaiensis fuit
acquisita per Christianos 80
Errata 85
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U.C. BERKELEY LIBRA
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